tag:blogger.com,1999:blog-36197642987924488382024-03-13T23:00:24.569+01:00Redistributions blogInégalités et fiscalités en questionUnknownnoreply@blogger.comBlogger85125tag:blogger.com,1999:blog-3619764298792448838.post-61222797752930728402019-12-23T23:14:00.000+01:002019-12-26T22:02:33.774+01:00"Capital et Idéologie": un manuel pour déconstruire le fatalisme inégalitaireAvec "Le Capital au XXIe siècle" (2013), Thomas Piketty affichait la couleur de son ambition: décrire avec une précision minutieuse l'état des inégalités de revenus et de patrimoine dans le monde depuis le XIXe siècle jusqu'à l'aube du XXIe et ébaucher des propositions globales pour les ramener à des niveaux socialement acceptables. Si ces dernières ont suscité débats et controverses, nul n'a mis en doute l'acuité des observations, déclinées en de <a href="http://piketty.pse.ens.fr/fr/capital21c">nombreux graphiques accessibles librement</a>, ni les perspectives qu'elles ouvraient pour approfondir le débat public sur les inégalités.<br />
"Le Capital au XXIe siècle" reste <a href="http://ndonne.blogspot.com/2013/10/le-capital-au-xxie-siecle-de-thomas.html">une formidable boite à outils</a>. Traduit en 40 langues et vendu à 2,5 millions d'exemplaires, le livre a transformé la perception publique des inégalités.<br />
"Capital et Idéologie", que l'auteur a publié en septembre 2019, poursuit ce travail avec une ambition plus grande encore. A travers les 1.200 pages du volume, Thomas Piketty s'efforce de décrire l'évolution des inégalités dans les principales sociétés humaines depuis 1500, et surtout les idéologies qui permettent de les légitimer. "<i>Chaque société humaine doit justifier ses inégalités</i>", écrit-il en introduction. "<i>Il faut leur trouver des raisons, faute de quoi c'est l'ensemble de l'édifice politique et social qui menace de s'effondrer</i>".<br />
"Capital et Idéologie" présente donc au lecteur non seulement des ordres de grandeurs inédits pour comprendre l'ampleur des inégalités (y compris pour les époques et sociétés où la mesure des richesses était beaucoup moins précise qu'aujourd'hui), mais aussi une analyse des idéologies les justifiant, telles qu'elles se sont données à voir dans les débats politiques, la littérature et la vie intellectuelle. A cette aune, les sociétés ternaires (clergé, noblesse, tiers état), esclavagistes, coloniales, sociales-démocrates, soviétiques et post-soviétiques, et hypercapitalistes sont analysées systématiquement. A nouveau, <a href="http://piketty.pse.ens.fr/files/Piketty2019GraphiquesTableauxLiens.pdf" target="_blank">tous les graphiques qui sous-tendent les observations sont proposés en libre accès</a>.<br />
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<b>Comprendre le passé pour agir sur le présent</b></blockquote>
Ce tour du monde et des époques sert un objectif: en pédagogue, Thomas Piketty veut outiller la délibération publique afin qu'elle s'enrichisse des enseignements des siècles passés, des autres continents. "<i>(L)es processus d'apprentissages collectifs (...) ont tendance à avoir la mémoire courte (on oublie souvent les expériences de son propre pays au bout de quelques décennies, ou bien on n'en retient que quelques bribes, rarement choisies au hasard), et surtout ils sont le plus souvent étroitement nationalistes. Ne noircissons pas le trait: chaque société tire parfois quelques leçons des expériences des autres pays, par la connaissance qu'elles en ont, et aussi bien sûr à travers des rencontres plus ou moins violentes entre les différentes sociétés (guerres, colonisation, occupations, traités plus ou moins inégaux, ce qui n'est pas toujours le mode d'apprentissage le plus serine ni le plus prometteur). Mais, pour l'essentiel, les différentes visions du régime politique idéal, du régime de propriété souhaitable ou du système légal, fiscal ou éducatif juste se forgent à partir des expériences nationales en la matière, et ignorent presque complètement les expériences des autres pays, surtout lorsqu'ils sont perçus comme éloignés et relevant d'essences civilisationnelles, religieuses ou morales distinctes (...)</i>".<br />
Mieux comprendre le passé pour agir sur le présent, tel est donc le propos d'un livre qui, comme "Le Capital au XXIe siècle" se veut à la fois enquête et manifeste - manifeste de ce que pourrait être une politique de l'égalité au XXIe siècle. Il faut ne pas avoir lu Piketty pour suggérer, <a href="https://www.youtube.com/watch?v=63HKRmuZX4c" target="_blank">comme cette chroniqueuse de C à vous</a>, qu'il pourrait appartenir aux "pessimistes": l'homme oeuvre au contraire à ré-équiper la gauche, à la ré-enchanter même, une tâche d'autant plus nécessaire que "l<i>a chute du communisme a</i> <i>conduit au développement d'une forme de désillusion face à toute possibilité d'une économie juste, sentiment qui nourrit en ce début de XXIe siècle les replis identitaires et qui doit être dépassé</i>".<br />
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<b>Ordres de grandeurs pour la pensée décoloniale</b></blockquote>
S'il est un talent qu'il faut reconnaître à Piketty, c'est celui de mettre en perspective les variations de l'inégalité à travers les époques et les situations sociales, d'une manière qui permette au lecteur d'en saisir l'ampleur. Dans "Capital et Idéologie", les chapitres consacrés aux sociétés esclavagistes et coloniales sont, en la matière, particulièrement éclairants.<br />
L'histoire sombre d'Haïti, si elle est bien connue, prend une dimension plus tragique encore quand on mesure, aux pages 259 à 275, l'ampleur des transferts monétaires qu'ont représenté tant l'exploitation esclavagiste (voir <a href="http://piketty.pse.ens.fr/files/ideologie/pdf/G7.7.pdf" target="_blank">ce graphique</a> sur la part exorbitante de la richesse nationale accaparée par le centile de la population le plus riche, correspondant à l'élite esclavagiste - un niveau d'inégalité que Piketty présente comme l'un des plus élevés jamais atteint) que la <a href="https://www.liberation.fr/planete/2010/03/25/haitila-dette-originelle_617159" target="_blank">dette infligée à l'île en contrepartie de l'indépendance</a>.<br />
"<i>Il est important de se rendre compte de ce que représente cette (dette)</i>", explique Piketty. "<i>Des recherches récentes ont démontré que que ces 150 millions de francs-or représentaient plus de 300% du revenu national d'Haïti en 1825. (...) Avec un refinancement à un taux d'intérêt annuel de 5% typique de l'époque, et sans même prendre en compte les juteuses commissions que les banquiers ne manquèrent pas d'appliquer au fur et à mesure des multiples péripéties et renégociations qui allaient marquer les décennies suivantes, cela signifiait que Haïti aurait dû payer chaque année l'équivalent de 15% de sa production indéfiniment, simplement pour acquitter les intérêts de sa dette, tout cela sans même commencer à rembourser le capital</i>". Cette dette ne fut remboursée finalement qu'en 1950, ce qui signifie que "<i>pendant plus d'un siècle, le prix que la France voulut faire payer à Haïti pour sa liberté eut surtout pour conséquence que le développement économique et politique de l'île fut surdéterminé par la question de l'indemnité, tantôt violemment dénoncée, tantôt acceptée avec résignation, au gré de cycles politico-idéologiques interminables</i>".<br />
Et de poursuivre: Aujourd'hui, "i<i>l faut pointer l'extrême faiblesse des arguments évoqués par ceux qui refusent d'ouvrir le dossier haïtien (...). L'argument selon lequel tout cela serait trop ancien ne tient pas. Haïti a remboursé sa dette à des créditeurs français et étatsuniens de 1825 à 1950, c'est-à-dire jusqu'au milieu du XXe siècle. Or, il existe de nombreux processus de dédommagements qui continuent d'avoir lieu aujourd'hui pour des expropriations et des injustices qui se sont déroulées au cours de la première moitié du XXe siècle. On pense notamment aux spoliations de biens juifs perpétrés pendant la Seconde guerre mondiale (...)</i>".<br />
Cette mise en perspective viendra sans doute appuyer un courant de pensée décoloniale, qui, s'il est en vogue dans les sciences sociales et dans le débat public, ne débouche encore que peu sur des demandes de nature financière. On parle beaucoup de décoloniser les arts et les culture; les pages de "Capital et Idéologie" nourriront ceux qui veulent décoloniser la dette.<br />
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Le cas de Haïti n'est en effet que l'illustration la plus extrême des fondements iniques de l'abolition de l'esclavage: dans les anciennes colonies françaises et britanniques, non seulement les esclaves n'ont pas été indemnisés, mais ce sont leurs anciens propriétaires qui ont bénéficié de généreuses compensations. Payées par les Etats nouvellement indépendants, comme à Haïti, ou de façon non moins scandaleuse par les contribuables de la métropole (à hauteur de 4 à 5 points de PIB en Angleterre et de 2 points en France). </div>
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Hors de la question esclavagiste stricto sensu, Piketty apporte aussi des éléments pour nourrir les discussions sur les transferts entres les colonies et les métropoles (ainsi qu'entre les populations locales et les colons au sein même des colonies). Il mesure notamment les revenus des actifs étrangers français et britanniques durant la seconde période coloniale. "<i>Le rendement obtenu par ces placements avoisinait 4% par an, si bien que les revenus du capital étranger apportaient à la France autour de 5% de revenu national additionnel et au Royaume-Uni plus de 8% de revenu national supplémentaire. Ces intérêts, dividendes, profits, loyers et autres royalties venus du reste du monde permettaient ainsi d'accroître substantiellement le niveau de vie des deux puissances coloniales, ou tout du moins de certains segments de la population en leur sein</i>". </div>
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Piketty ne fait qu'ébaucher la question des transferts coloniaux, et on regrette d'ailleurs de ne rien lire sur les extractions congolaises de la Belgique. Mais sans doute les outils qu'il propose inspireront-ils d'autres à pousser plus loin l'analyse.</div>
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<b>Des quotas indiens à la co-gestion allemande: apprendre de l'histoire du monde</b></blockquote>
Il ne saurait être question de proposer ici un résumé du tour du monde auquel nous invite "Capital et Idéologie". Mais parmi les nombreux apprentissages que l'auteur propose de prendre en considération, celui qu'offre le système de discrimination positive adopté en Inde après l'indépendance est inspirant. Ce régime, élargi au fil des décennies, a permis à de larges portions défavorisées de la population indienne (jusqu'à 70% aujourd'hui) de bénéficier d'accès privilégiés à l'enseignement et à la fonction publique. "<i>Les éléments disponibles suggèrent que les politiques menées en Inde ont permis de réduire significativement les inégalités entre les anciennes castes discriminées et le reste de la population entre les années 1950 et les années 2010, d'une façon plus forte par exemple que dans le cas des inégalités entre Noirs et Blancs aux Etats-Unis, et incomparablement plus forte que les inégalités entre Noirs et Blancs en Afrique du Sud depuis la fin de l'apartheid</i>", comme le montre le <a href="http://piketty.pse.ens.fr/files/ideologie/pdf/G8.6.pdf" target="_blank">graphique</a> suivant. De quoi redonner du crédit aux politiques de quotas et de places réservées ?<br />
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<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjdGkkO-Fo7tCvlmQwlnb-g_AeMN_FdPNTZHYW8XfhazfhCgtIHcdvAep_ONBwfINdbbacEls212ry-ZzMD0k1NeE6r1cWKJa3qwU4sNUx1RxGqnPNzKpoI4R5GV3Z6RFjV_-pmPemU-kLW/s1600/Capture+d%25E2%2580%2599e%25CC%2581cran+2019-12-23+a%25CC%2580+22.16.58.png" imageanchor="1"><img border="0" height="396" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjdGkkO-Fo7tCvlmQwlnb-g_AeMN_FdPNTZHYW8XfhazfhCgtIHcdvAep_ONBwfINdbbacEls212ry-ZzMD0k1NeE6r1cWKJa3qwU4sNUx1RxGqnPNzKpoI4R5GV3Z6RFjV_-pmPemU-kLW/s640/Capture+d%25E2%2580%2599e%25CC%2581cran+2019-12-23+a%25CC%2580+22.16.58.png" width="640" /></a><br />
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L'"égalité inachevée" des sociétés sociales-démocrates peut également continuer de nous inspirer, dit Piketty, même après des décennies de sape néo-libérale. La cogestion des entreprises instituée dans la législation allemande après la guerre (la "propriété sociale") a permis de mieux partager le pouvoir entre les actionnaires et les salariés sans empêcher l'industrie allemande d'être compétitive. Au passage, le livre retrace l'histoire méconnue de l'un des échecs de l'Europe sociale, celui de différents projets de directive visant à établir au moins un tiers d'administrateurs salariés dans les conseils d'administration des entreprises de plus de 500 salariés.<br />
Il est intéressant d'observer, plus avant, que sur le thème du partage du pouvoir entre les parties prenantes des entreprises, Piketty refuse de "<i>se limiter à une confrontation entre un modèle purement coopératif (une personne, une voix) et un modèle purement actionnarial (une action, une voix)</i>". Il préconise au contraire les formes mixtes, et notamment la généralisation d'un <a href="https://journals.openedition.org/questionsdecommunication/10247" target="_blank">modèle développé par Julia Cagé (accessoirement sa compagne) pour le secteur des médias</a>, et prévoyant un plafonnement des droits de vote pour les plus gros actionnaires.<br />
Les trajectoires de l'impôt progressif sur le revenu, sur le patrimoine et sur les successions sont également analysées comme une voie fondamentale pour dépasser "l'idéologie propriétariste" qui définit le capitalisme, et que l'auteur a longuement décrite dans la première partie du livre.<br />
<blockquote class="tr_bq">
<b>Dépasser le capitalisme</b></blockquote>
En tout état de cause, dépasser le capitalisme ne saurait être accompli par la voie d'une solution "<i>qu'il n'y aurait plus qu'à appliquer les yeux fermés</i>". Mais en combinant les formules vertueuses, en apprenant du passé et du monde, en inventant de nouvelles voies, il sera peut-être possible de ramener les inégalités à des niveaux moins aberrants qu'aujourd'hui.<br />
C'est le pari que fait l'auteur, en dépit de la montée actuelle d'un courant national-populiste diamétralement opposé à sa vision. Vision naïve peut-être, déterministe parfois, dans laquelle le mouvement du monde vers davantage d'égalité, entamé avec la révolution française, est voué à s'amplifier malgré des contre-temps historiques. <br />
"<i>Compte tenu du bilan largement positif du socialisme démocratique et de la social-démocratie au XXe siècle, en particulier en Europe occidentale, il me semble que le mot 'socialisme' mérite encore d'être utilisé XXIe siècle, en l'occurrence en s'inscrivant dans cette tradition, tout en cherchant à la dépasser et à répondre aux insuffisances sociales-démocrates les plus criantes observées au cours des dernières décennies</i>", avance celui qui fut conseiller de Benoit Hamon à la dernière élection présidentielle. Il faut oser cet aplomb, quand on sait la déroute du candidat socialiste, et celle de nombreux partis sociaux-démocrates, en lesquels les électeurs ne voient plus les défenseurs des classes populaires, mais ceux des élites culturelles urbaines. <br />
Les propositions énumérées au dernier chapitre du livre ("Eléments pour un socialisme participatif au XXIe siècle") n'ont cependant que peu en commun avec les idées molles défendues par les socialistes européens au cours des dernières décennies - en particulier ceux qui ont été au pouvoir. <br />
Partage du pouvoir dans les entreprises, dotation universelle en capital à chaque jeune adulte financée par un impôt progressif sur la propriété, imposition progressive de l'héritage et du revenu aux niveaux atteints au milieu du XXe siècle, taxation progressive des émissions carbones, construction d'une norme de justice éducative, réforme du financement des partis politiques, développement d'un social-fédéralisme à l'échelle mondiale... le catalogue des mesures avancées par Piketty semble dessiner une utopie inaccessible. Il a le mérite de fixer un horizon clair. Davantage qu'une fantaisie, ce catalogue n'est-il pas une nécessité, à une époque où les réalités politiques sont tissées de ce qui n'était même pas envisageable hier, où les systèmes politiques déliquescents sont abattus par le populisme et l'extrême-droite ? <br />
"Capital et Idéologie" est un manuel inspirant pour lutter contre le fatalisme inégalitaire. "<i>Le journaliste et le citoyen s'inclinent trop souvent devant l'expertise de l'économiste, pourtant fort limitée, et se refusent à avoir une opinion sur le salaire et le profit, l'impôt et la dette, le commerce et le capital</i>", pointe Piketty en conclusion. En outillant ses lecteurs, Thomas Piketty contribue très certainement à relever l'ambition du débat public.<br />
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<br />Unknownnoreply@blogger.com1tag:blogger.com,1999:blog-3619764298792448838.post-21818831318853095622016-08-02T17:02:00.002+02:002016-08-02T17:02:58.615+02:00Robin des bois est mort. La Belgique l’a tuéRobin des bois est mort. C’est-à-dire : dans sa version fiscale. La taxe Robin des bois, c’est le petit nom que les ONG ont donné à la taxe sur les transactions financières, également connue sous le patronyme de son inventeur, l’économiste James Tobin, qui goûtait peu de voir son très sérieux projet ainsi repris par des gauchistes aux cheveux longs. Mais peu importe la filiation de la taxe Tobin, souvenons-nous qu’en 2011, après trois décennies de palabres, la Commission européenne lui a donné une chance unique de sortir de la théorie économique pour entrer dans la réalité des marchés. La proposition devait permettre de de prélever une trentaine de milliards d’euros sur les transactions financières. Certains imaginaient déjà la recette affectée aux pays en développement. Une vraie taxe Robin des bois, donc, parce que plus que d’autres impôts elle avait pour objectif de prendre aux riches pour le donner aux pauvres.<br />
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<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg_VGJTtdgkt-htDTO4sr5jf6zClhBxhYIscp8lA_AaieNjT5sgHl9ebYOyWyrbxBjwn2LmY7NaAsNPuhX7D0FOaRj18rIVW_3U9JKhTBjhGQPAk9Jgu1vEvm1zSF8wNfNJ3y7qnRY1634l/s1600/robin.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg_VGJTtdgkt-htDTO4sr5jf6zClhBxhYIscp8lA_AaieNjT5sgHl9ebYOyWyrbxBjwn2LmY7NaAsNPuhX7D0FOaRj18rIVW_3U9JKhTBjhGQPAk9Jgu1vEvm1zSF8wNfNJ3y7qnRY1634l/s1600/robin.jpg" /></a></div>
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Las, cinq ans après la proposition de la Commission, les Etats membres de l’UE peinent toujours à trouver un compromis pour la mettre en application. Jusqu’en 2013, assez commodément, il était facile de blâmer les méchants anglo-saxons ultra-libéraux, opposés au projet. Mais depuis que la taxe est négociée entre une avant-garde de 11 Etats membres, les masques tombent. La Belgique, a-t-on, appris récemment, et plus particulièrement son ministre des Finances, le N-VA Johan Van Overtveldt, rechignent tellement que les négociations pourraient capoter. C’est un virage à 180 degrés pour un pays qui fut pionnier dans le domaine : en 2004, la Chambre belge des représentants était la première en Europe à adopter une résolution favorable à la taxe. La Belgique a depuis soutenu le projet dans les instances européennes, et cette ligne est toujours inscrite dans l’accord de l’actuel gouvernement de Charles Michel Michel. Pour la galerie, sans doute, car derrière les portes closes du Conseil des ministres européens, son ministre des Finances fait tout ce qui est en son pouvoir pour raboter le projet de taxe. Johan Van Overtveldt tient à ce que la Belgique reste com-pé-ti-tive en tant que centre financier, surtout que ses deux grands rivaux, le Luxembourg et les Pays-Bas ont eux carrément refusé de participer aux négociations. Pour la même raison, le ministre refuse de récupérer 700 millions de cadeaux fiscaux aux multinationales, octroyées à travers le mécanisme de l’excess profit ruling, comme le lui ordonne la Commission européenne. Il joue également l’obstruction sur une directive anti-évitement fiscal. Cette politique rencontre du succès, si on en croit un rapport récent: la Belgique se classe sur la deuxième marche du podium européen en matière de législation favorisant l’optimisation fiscale agressive. <br />
Bref, le tax shift, ce fameux glissement qui devait rééquilibrer notre fiscalité, reste loin, très loin du compte. La taxation du travail aura sans doute été un peu réduite, mais pas assez pour changer la plate réalité de notre plat pays : il demeure un paradis fiscal pour les multinationales, et un enfer fiscal pour ses citoyens.Unknownnoreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3619764298792448838.post-4829075273502103922016-06-10T11:26:00.002+02:002016-06-10T12:18:26.086+02:00Ubérisation, classes moyennes et inégalitésUn salaire convenable, un emprunt hypothécaire remboursable, une voiture et un frigo rempli : ne sont-ils pas les principaux signes extérieurs d’appartenance à une certaine classe moyenne ? Ce statut social hérité des trente glorieuses, qu’un emploi dans une grosse société devait permettre de garantir, est en train de s’éroder. La carrière à l’ancienne, du diplôme à la pension, avec progression barémique et avantages extra-légaux n’a plus tellement cours à l’heure de l’intérim, de la loi Peeters et de l’ubérisation.<br />
Une <a href="https://www.researchgate.net/publication/228658957_Corporations_and_Economic_Inequality_Around_the_World_The_Paradox_of_Hierarchy" target="_blank">étude américaine</a> récente vient d’établir une corrélation forte entre le taux d’emploi dans les grandes sociétés et le degré d’inégalité. La baisse du nombre d’employés des 10 plus grandes entreprises d’un pays semble proportionnelle à l’augmentation des inégalités. Le résultat est quelque peu contre-intuitif : on ne pense pas vraiment aux multinationales, ni aux géants du BEL20 comme des paradis égalitaires. Pourtant, expliquent les auteurs de l’étude, une certaine forme de coopération sociale et un degré plus élevé de syndicalisation au sein de ces grandes sociétés sont les garants d’une redistribution de la richesse créée à travers les salaires. <br />
Or aujourd’hui, les grandes entreprises n’ont plus le même profil qu’autrefois: réorganisées et allégées, elles se sont débarrassé des tâches périphériques : le nettoyage, la cantine, le marketing, les relations à la clientèle et même parfois la comptabilité ont été outsourcées, délocalisées, filialisées. Ces tâches et d’autres sont désormais confiées à de petites entités tierces où le sens de l’égalité salariale et la syndicalisation n’ont plus cours. <br />
Finie l’époque où les constructeurs automobile donnaient de l’emploi à des banlieues entières. Renault, Volvo, General Motors ont levé le camp de nos quartiers. La nouvelle ère est celle des services et des flexi-jobs. Aujourd’hui, dans certaines banlieues françaises, <a href="http://www.slate.fr/story/117807/uber-banlieue" target="_blank">Uber est le principal employeur</a>, dépassant les fast-food ou le secteur de la construction.<br />
« <i>Je me souviens de l’ancien temps, dans les universités, quand les agents de nettoyage se comportaient comme mes patrons</i> », <a href="https://www.youtube.com/watch?v=B1eOVU61mZE" target="_blank">plaisante</a> Yannis Varoufakis, l’économiste iconoclaste connu pour son bref passage au ministère grec des Finances. «<i> Ils entraient dans mon bureau, ils me rabrouaient, ils me disaient de rentrer chez moi quand je travaillais trop tard. Ils avaient le sentiment d’appartenir à une institution et d’être importants. Et qu’est-ce qui s’est passé ? Nous avons sous-contracté une société qui engage des travailleurs de nuit sous-payés, sans visage, qui ne se sentent pas connectés à l’institution</i> ».<br />
Aux Etats-Unis, des millions de travailleurs, dans tous les secteurs de l’économie, ont basculé dans l’emploi ubérisé, et la tendance n’est pas près de s’inverser. L’Europe emboîte le pas. Pour Varoufakis, seul un revenu universel, donnant la possibilité de refuser un emploi, permettrait de rééquilibrer le système, tant sur le plan de la justice sociale qu’au niveau-macro-économique. Quoi qu’on pense de cette idée controversée, le débat a le mérite de clarifier une chose : à l’ère du capitalisme 2.0, rétablir plus d’égalité dans le système ne pourra se faire qu’à travers des mécanismes sociaux innovants.<br />
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Billet diffusé dans le magazine Image Demain Le Monde<br />
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Unknownnoreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3619764298792448838.post-58898774173162032642016-03-01T11:46:00.000+01:002016-06-10T11:56:02.768+02:00Du cuir en première classeDes sièges en cuir pour les compartiments de première classe ? A l’heure où l’on économise à tout crin à la SNCB, l’idée est plutôt interpellante. Et pourtant, la ministre de la Mobilité, Jacqueline Galant (MR), <a href="http://www.sudinfo.be/1513185/article/2016-03-13/la-ministre-galant-veut-du-luxe-en-1re-classe-voici-les-sieges-en-cuir" target="_blank">assume</a> ce choix. « <i>Une première classe plus luxueuse répond aux exigences visant à établir une distinction entre la première et la deuxième classe, et convaincre ainsi davantage de clients de prendre le train</i> », a-t-elle argumenté.<br />
La SNCB travaille en effet à développer une véritable classe affaires, histoire de faire payer plus cher le prix du billet. Une évolution qui n’a rien d’anecdotique. Partout dans le monde, des opérateurs de transport réfléchissent à diverses manières de marquer les différences de confort entre les classes pour générer davantage de revenus.<br />
Aux Etats-Unis, les compagnies aériennes ont ainsi créé la classe « basique », inférieure à la classe économique. Les passagers ne sont certes pas relégués dans la soute de l’avion, mais leurs possibilités de réservation sont rognées au maximum : ils recevront les plus mauvais sièges et n’auront aucune possibilité de modifier le ticket.<br />
De son côté, un opérateur comme Delta Air Lines propose désormais cinq catégories de tarifs différents, ce qui lui permet de viser des consommateurs aux pouvoirs d’achat variés.<br />
Bien sûr, la plupart de ces compagnies veillent à rester dans le politiquement correct, ce qui n’empêche pas certaines d’entre elles de commettre des erreurs de communication. En Italie, un spot publicitaire mettant en scène une famille d’immigrés voyageant en quatrième classe dans un train de Trenitalia a ainsi suscité la polémique.<br />
Quelles que soient les précautions prises, le constat reste identique : plus les écarts de revenus se creusent, plus la différence de qualité au niveau des biens et des services se fait sentir.<br />
On savait déjà que le secteur du luxe, tout autant que les chaînes de magasins ultracompétitifs (les fameux hard discount), résistaient mieux à la crise économique que les enseignes intermédiaires. Aujourd’hui, on se rend compte que des services théoriquement publics sont de plus en plus différenciés. Nous avons un système scolaire inégalitaire, une justice à deux vitesses et, désormais, un transport de moins en moins « en commun ».<br />
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<b>Capitalisme patrimonial</b><br />
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Au-delà des mots et des symboles, les inégalités deviennent donc de plus en plus sensibles. Et elles nous ramènent, comme l’affirme l’économiste Thomas Piketty, à l’ère du « capitalisme patrimonial », quand quelques familles concentraient entre leurs mains l’essentiel du capital. A l’époque du Titanic, par exemple. Ce paquebot transatlantique dont le naufrage, le 14 avril 1912, représente à lui seul un exemple flagrant d’injustice sociale : cette nuit-là, 60 % des passagers de première classe survécurent, contre 42 % en deuxième et 25 % en troisième. <br />
Rassurons-nous : la marche vers l’inégalité n’a rien d’inexorable. Durant de longues décennies, la tendance inverse a prévalu, depuis la suppression de la troisième classe en 1952 dans les trains belges jusqu’à l’abolition des compartiments de première classe dans le métro parisien en 1991.<br />
Au début des années 2 000, la SNCB avait même envisagé d’instaurer une seule classe pour tous. « Un des objectifs de l’entreprise est d’offrir des places assises pour tous. Une fois cet objectif atteint, la première classe n’aura vraiment plus de raison d’être », expliquait alors un dirigeant de la SNCB. Autres temps, autres mœurs…<br />
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Unknownnoreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3619764298792448838.post-88135610818135927582016-02-27T20:40:00.001+01:002016-02-27T20:50:53.139+01:00Grand amour et statut social: en 2016, la foudre ne tombe toujours pas n’importe où<div class="p1">
<span class="s1">Depuis Romeo et Juliette, morts sur l’autel des querelles entre leurs deux familles, on sait qu’il ne fait pas bon frayer en dehors de son groupe social. De tous temps, le mariage a été pour les communautés une manière de préserver le capital génétique, symbolique ou financier. Pour cette raison, il constitue un champ d’analyse privilégié de la sociologie. </span></div>
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<span class="s1">L’homogamie – la tendance à se marier à l’intérieur de sa communauté- <i>« est considérée comme l’indicateur principal de la cohésion des groupes sociaux </i>», explique le sociologue français Milan Bouchet-Valat. Et pourtant, son évolution à travers temps n’a que peu été mesurée. Le chercheur a entrepris de remédier à ce manque en croisant les données des mariages à celles du niveau d’étude en France entre 1969 et 2001. Un demi-siècle après l’affirmation fameuse, par le démographe Alain Girard que « <i>la foudre, quand elle tombe, ne tombe pas n'importe où</i> », Milan Bouchet-Valat fait une découverte surprenante. Le coup de foudre semble bien devenir un peu plus aléatoire. Le mariage s’est en effet largement décloisonné : le taux de couples dotés du même niveau de diplôme (appelé « homogamie de diplôme ») est passé de 47% en 1969 à 27% en 2001. </span></div>
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<span class="s1">On observe ainsi une multiplication de couples associant un(e) cadre du supérieur à un(e) membre de classe populaire ou à un(e) employé(e) qualifié(e). Dans toutes les couches de la société, on semble hésiter moins à tomber amoureux de quelqu’un qui n’a pas les mêmes origines sociales. Toutes ? Non, un groupe résiste encore à la mixité. Les élèves de grandes écoles, ces fabriques très françaises de l’élite nationale, continuent de se marier entre eux. Le taux d’homogamie y a même augmenté en trente ans. Le phénomène peut s’expliquer par un entre-soi accru au sein de ces établissements : non seulement la part des enfants issus des classes populaires y a-t-elle baissé plus rapidement que dans le reste de la population, mais l’arrivée des femmes dans ces écoles auparavant exclusivement masculines y a augmenté les probabilités de rencontres amoureuses.</span></div>
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<span class="s1">Le tableau de l’homogamie de diplôme ressemble donc étrangement à celui des inégalités de patrimoine et de revenus : il dépeint un sommet de plus en plus isolé du reste de la population. La tendance est confirmée par les résultats d’une autre recherche récente. Dans une étude sur « le rôle de l’héritage et du revenu du travail dans les choix matrimoniaux », l’économiste Nicolas Frémeaux montre que les héritiers tendent à se marier entre eux. Cette « homogamie d’héritage » serait également en augmentation.</span></div>
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<span class="s1">Bref, à rebours de la société, l’élite ne semble toujours pas disposée à frayer avec les gueux. Si vous comptiez sur un bon mariage pour vous faire une situation, mieux vaut ne pas vous faire trop d’illusion. Vu les évolutions sociétales, vous aurez plus de chances en jouant à la loterie. </span></div>
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<span class="s1"><b>Plus d'informations</b></span></div>
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<span class="s1"><a href="http://www.cairn.info/resume.php?ID_ARTICLE=RFS_553_0459" target="_blank">Les évolutions de l’homogamie de diplôme, de classe et d’origine sociales en France (1969-2011) : ouverture d’ensemble, repli des élites</a> (MilanBouchet-Valat)</span></div>
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<a href="http://www.cairn.info/resume.php?ID_ARTICLE=POPU_1404_0551" target="_blank">Le rôle de l’héritage et du revenu du travail dans les choix matrimoniaux</a> (Nicolas Frémeaux)</div>
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Retrouvez cette chronique dans le magazine <a href="http://www.imagine-magazine.com/lire/" target="_blank">Imagine Demain Le Monde</a></div>
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Unknownnoreply@blogger.com1tag:blogger.com,1999:blog-3619764298792448838.post-48011373770627766422015-04-10T17:51:00.002+02:002015-04-10T17:51:13.337+02:00Le blog Redistributions priméLe blog Redistributions a remporté le prix de la presse du Conseil fédéral pour le développement durable (CFDD), catégorie Médias électroniques, pour l'article "<a href="http://www.redistributions.eu/2014/11/prosommateurs-de-tous-les-pays-unissez.html" target="_blank">Prosommateurs de tous les pays, unissez-vous!</a>"<br />
"Le jury a apprécié l’approche critique et la qualité journalistique de la candidature", selon le communiqué (<a href="http://www.frdo-cfdd.be/sites/default/files/content/download/files/comdepresse_remise_prix_presse_2015fr.pdf" target="_blank">ici</a>).Unknownnoreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3619764298792448838.post-73537137055078826692015-03-19T18:27:00.001+01:002015-03-19T18:27:09.531+01:00Transparence fiscale: la Commission a-t-elle frappé à côté du clou ? <div style="text-align: center;">
<i>par Elodie LAMER</i></div>
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Le 14 novembre 2014, le commissaire européen à la Fiscalité, Pierre Moscovici, se présente devant le Parlement européen suite au scandale Luxleaks, qui a mis en lumière comment des multinationales ont tiré profit des tax rulings pour réduire leurs taxes à des taux proches de zéro. La Commission annonce alors son intention de présenter un échange automatique d’informations sur ces rulings. « Je souhaite aussi examiner de quelle manière la transparence sur les tax rulings peut aussi passer par des obligations mises à la charge des entreprises bénéficiaires », dit alors Pierre Moscovici devant les députés européens.<br />
Le paquet transparence fiscale que la Commission européenne a présenté mercredi prévoit la transparence entre administrations fiscales sur les rulings transfrontaliers dès 2016, et se contente d’annoncer une étude d’impact sur la divulgation publique d’informations fiscales par les multinationales. Le commissaire Pierre Moscovici n’y peut pas grand-chose, cette question est hors de son giron. Elle sera davantage une affaire pour ses collègues Jonathan Hill et Vera Jourova. Certains disent ce premier plutôt réticent, mais à la Commission, on indique que les deux commissaires sont d’accord sur le principe, la question étant de savoir comment s’y prendre. Le Président de la Commission, Jean-Claude Juncker, t dit lui-même au collège mercredi qu’il fallait aller plus loin sur la transparence, a expliqué Pierre Moscovici en conférence de presse. Ce dernier estime que transparence des entreprises doit compléter l’échange automatique entre administrations fiscales et non s’y substituer.<br />
Le secteur associatif ne semble pas de cette opinion et n’a pas fait attendre ses critiques. « En n’incluant pas le reporting pays par pays dans sa proposition sur la transparence, la Commission trompe les citoyens », a estimé sans détour Oxfam. « Partager les rulings fiscaux entre les autorités fiscales des Etats membres n’est pas suffisant », explique aussi ActionAid. ONE et Transparency International se sont jointes à l’appel pour un reporting public pays par pays, reconnaissant tout de même le premier pas que constitue l’initiative de la Commission.<br />
Les réactions des grands groupes du Parlement (conservateurs, socialistes et libéraux) laissent penser qu’ils en attendent également davantage, notamment de la part des entreprises. Les conservateurs, par la voix du Français Alain Lamassoure qui préside la commission spéciale TAXE au Parlement instaurée suite à Luxleaks, dit que « la transparence entre les États membres est une première étape. La suivante doit être la transparence maximale possible entre les acteurs économiques eux-mêmes et les consommateurs ». Pour les socialistes, l’Italien Gianni Pittella engage son groupe à soutenir le reporting pays par pays. Le libéral allemand Michael Theurer, qui corédigera un rapport pour cette commission spéciale, a salué le paquet de la Commission mais attend également davantage.<br />
Les Verts ne sont vraiment pas impressionnés. « Il s'agit de la plus petite étape qu'il était possible de franchir vers plus de justice fiscale au sein de l'UE », a critiqué la Française Eva Joly, députée européenne des Verts.<br />
Forts des <a href="http://www.greens-efa.eu/fr/regulation-bancaire-crd-iv-9605.html" target="_blank">exigences de transparence qu’ils ont réussi à imposer</a> aux institutions à travers la directive CRDIV, les Verts ont voulu prendre la Commission de vitesse et ont déposé des amendements pour appliquer ces règles aux multinationales dans la directive droit des actionnaires, actuellement sur la table. Sauf que la Commission ne semble pas vouloir inscrire ces exigences dans une directive à la hâte, sur un Ipad, lors d’un trilogue, à 3h du matin, comme ce fut le cas pour CRDIV. Si proposition elle présente, celle-ci devra être bien calibrée. C’est que, comme le note un diplomate, d’une part, cette approche rentre en conflit avec celle de l’OCDE, qui se dirige vers un ‘reporting pays par pays’ aux administrations fiscales. D’autre part, certaines questions de confidentialité et du droit des affaires se posent. Enfin, il y a une certaine réticence à effrayer davantage les entreprises à un moment où l’Europe est déjà désespérément à la recherche d’investissements. Le patronat français, le MEDEF, tente par ailleurs de tuer dans l’œuf l’initiative des Verts. Dans un courrier envoyé le 9 mars aux députés, le MEDEF estime qu’aucune initiative européenne dans ce domaine ne devrait être envisagée « avant la mise en oeuvre par les gouvernements des recommandations de l'OCDE », sinon, il y aurait un risque que soient adoptées des exigences qui n'y sont pas conformes, «ce qui porterait atteinte à la compétitivité et à l'attractivité des entreprises européennes». L’Afep, qui représente les grands groupes français, ne dit pas autre chose. Dans un article du quotidien français les Echos, paru le 17 mars, elle dit que « la transparence absolue, c’est l’échec de la régulation ».<br />
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<b>Pas la fin de l’histoire</b><br />
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Mais cette proposition n’est pas la fin de l’histoire, a promis Pierre Moscovici, qui veut revenir sur la question de la transparence dans ce qu’il appelle le paquet d’été. De plus, la Commission croit fermement au caractère dissuasif de sa proposition. Comme les rulings se font sur demande des entreprises, celles-ci risquent désormais d’y réfléchir à deux fois avant d’en faire la requête. La définition de rulings retenue par la Commission ne laisse en outre pas d’échappatoire, estime Pierre Moscovici. Certains Etats considèrent qu’ils n’accordent pas de tax rulings, mais ont des dispositions similaires que la Commission a tenu à englober via une définition large. Du côté des petites délégations, on aurait tout de même préféré que tous les rulings soient concernés, pas uniquement ceux ayant un impact transfrontalier. Par définition, les petits Etats ont des économies plus ouvertes et craignent un avantage compétitif pour les grands États membres si les rulings 'domestiques' ne sont pas échangés.<br />
La Commission voit d’autres avantages dans sa proposition : puisque les Etats devront échanger ces informations également avec elle, elle pourra regarder à souhait l’image globale des tax rulings, afin d’en identifier les éventuelles failles et proposer des conditions de conception commune pour ces rulings. Cet appel lui avait été lancé en novembre dernier par l’Italie, la France et l’Allemagne, dans une lettre conjointe à Pierre Moscovici. La Commission a déjà prévenu les Etats qu’il faudrait probablement y venir à un moment.<br />
Reste également la question des pays tiers. Que faire si les multinationales décident tout bonnement de plier bagage pour des pays où elles pourront agir impunément ? Pierre Moscovici veut une Europe qui reste attractive, mais considère que cela ne se défend ni sur le plan éthique ni économique de le faire aux prix d’une concurrence fiscale déloyale, au détriment des contribuables. La Commission note par ailleurs que dans le passé, les Etats lui ont donné mandat pour élargir aux pays tiers des dispositions de directives européennes (c’est le cas de la fiscalité de l’épargne). Il n’est pas à exclure que les Etats lui demanderont de faire de même avec l’échange automatique sur les rulings.<br />
Bref, la Commission est cernée de toute part pour le reporting pays par pays. Les ONG le lui réclament, de même que les députés européens et ceux-ci comptent maintenir la pression politique au maximum via la commission spéciale qu’ils ont mis en place. Il ne faut également pas oublier que la Commission européenne a à sa tête l’ancien Premier ministre Luxembourgeois, Jean-Claude Juncker, qui a été contrait de contre-attaquer rapidement après ce scandale qui l’a éclaboussé, quatre jours à peine après son entrée en fonction.<br />
En distribuant les portefeuilles des commissaires, en septembre dernier, Jean-Claude Juncker a décidé de mettre les pays en délicatesse avec certaines politiques face à leurs responsabilités (un ancien ministre français des Finances aux affaires économiques, un ancien lobbyiste de la City aux services financiers, …). En tant qu’ex-Premier ministre défenseur d’un système visant à attirer les multinationales à coup de cadeaux fiscaux et désormais à la tête d’une Commission supposée rectifier le tir, Jean-Claude Juncker va pouvoir tester, dans une certaine mesure, son propre remède. C’est un levier qu’il ne faut pas sous-estimer.Unknownnoreply@blogger.com1tag:blogger.com,1999:blog-3619764298792448838.post-85886090405253227422015-03-19T18:23:00.001+01:002015-03-19T18:23:13.462+01:00Le blog Redistributions change de formuleJ'ai initié ce blog, sous le nom de Nouvelle Donne, fin 2011, parce que je considérais que l'attention médiatique autour des enjeux de fiscalité internationale étaient bien trop insuffisante. Trop compliqué, trop technique: peu de gens s'intéressaient à ce qui est pourtant une facteur très important dans la hausse des inégalités.<br />
L'actualité a quelque peu changé les choses: les affaires Cahuzac, Hoeness, OffshoreLeaks, LuxLeaks, SwissLeaks ont mis la fiscalité sur le devant de la scène. A juste titre, les citoyens s'intéressent davantage aux mécanismes qui permettent aux multinationales d'éviter l'impôt. Ce blog continue de les analyser.<br />
Votre serviteur, toutefois, n'est plus journaliste. j'ai rejoint le CNCD-11.11.11, une importante plateforme belge d'ONG, dont l'une des campagne porte précisément sur le justice fiscale. Je ne suis pas dépaysé. Dans le même temps, j'ai décidé d'ouvrir le blog aux contributions extérieures, afin qu'il devienne davantage un espace de débats ouvert aux multiples points de vue. De nouveaux collaborateurs apporteront leurs analyses éclairées lors des prochaines semaines.<br />
La première d'entre eux sera Elodie Lamer, collaboratrice de l'agence Europe, qui suit de près l'évolution de la fiscalité internationale. Pour son premier billet, elle pose un regard critique sur le paquet de transparence, présenté cette semaine par la Commission européenne.Unknownnoreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3619764298792448838.post-49542813263139922142015-01-18T18:48:00.001+01:002015-01-20T14:00:39.018+01:00Amazon: quand Juncker l'Européen désavoue Juncker le LuxembourgeoisJean-Claude Juncker l'avait promis: il ne s'immiscerait pas dans les enquêtes menées par les autorités européennes de concurrence sur les rabais fiscaux octroyés aux multinationales par le Luxembourg. "Ce serait indécent", avait même ajouté le président de la Commission.<br />
Au vu des résultats préliminaires sur le traitement fiscal d'Amazon, il est bien vraisemblable que Juncker l'Européen soit contraint de pousser la décence jusqu'au désaveu complet de la ligne suivie par Juncker le Luxembourgeois.<br />
Car l'<a href="http://ec.europa.eu/competition/elojade/isef/case_details.cfm?proc_code=3_SA_38944" target="_blank">argumentaire</a> que viennent de présenter les experts de la DG concurrence est accablant. Seule l'extrême complexité du montage masque une vérité abrupte. En 2003, quand Jean-Claude Juncker était Premier ministre, le Grand-Duché a offert à Amazon un gigantesque cadeau fiscal pour que le géant de la distribution installe ses quartiers généraux sur le sol luxembourgeois. Un cadeau qui a privé les Etats voisins de recettes bien nécessaires, et qui a permis à Amazon de couler de nombreux concurrents en pratiquant des prix planchers.<br />
Essayons de décrypter ce montage, en nous appuyant sur le travail des services de la Commission. Nous en analyserons ensuite les conséquences économiques et politiques.<br />
La tête de pont d'Amazon en Europe est une société en <a href="https://www.creatrust.lu/fr/Societe-en-Commandite-Speciale-141.html#.VLvhGUfF-FU" target="_blank">commandite spéciale</a> (SCS), qui a la particularité d'être transparente. Je vous rassure: le monde économique n'est pas soudainement devenu un endroit parfaitement vertueux. La transparence en question n'a rien à voir avec une quelconque divulgation d'informations au public. Non, la SCS est transparente <i>fiscalement</i>, c'est-à-dire qu'on considère que ses bénéfices doivent être taxés a niveau de l'actionnaire, plutôt que dans l'entreprise elle-même. Lux SCS (le triangle sur sur le schéma ci-dessous) ne paie donc pas d'impôt. Zéro, nada, nothing.<br />
En théorie, les actionnaires américains devraient être imposés sur ce bénéfice, mais la Commission nous rappelle ce détail piquant: "<i>en raison d’un décalage dans la classification de Lux SCS (...) entre le Luxembourg et les États-Unis, l’imposition des associés aux États-Unis peut être <u>différée indéfiniment</u> aussi longtemps qu’aucun bénéfice n’est rapatrié aux États-Unis</i>". La vie est belle quand on a de bons avocats fiscalistes.<br />
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<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjlREYel68Z_-EQsIWH7OqJLNlsFuMzYHELcRw8D-8MmhIsT-upFIkDAuy0nXrAlAF0e14ikjacR4xKHf0NuqF8SPAlvmsTUWctAr5xMIxEXgLCH3l6f8mCCg9I7ypPIezroPPz0CfW45h5/s1600/amazon.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjlREYel68Z_-EQsIWH7OqJLNlsFuMzYHELcRw8D-8MmhIsT-upFIkDAuy0nXrAlAF0e14ikjacR4xKHf0NuqF8SPAlvmsTUWctAr5xMIxEXgLCH3l6f8mCCg9I7ypPIezroPPz0CfW45h5/s1600/amazon.jpg" height="260" width="400" /></a></div>
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Même ces bons avocats, toutefois, n'ont pas réussi à loger 100% des bénéfices européens d'Amazon dans Lux SCS. La plupart des bénéfices allemands, français et britanniques remontent d'abord vers la société luxembourgeoise LuxOpCo . Cette Société anonyme plus classique (SARL) paie bien un impôt sur le bénéfice, elle, d'environ 28%. Tout l'enjeu va donc être de faire remonter ces bénéfices d'encore un étage, vers l'entité transparente.<br />
Comment procèdent nos ingénieurs fiscaux ? Avec une technique bien rodée: les droits de propriété intellectuelle d'Amazon sont logés dans Lux SCS, qui les facture rubis sur ongle à LuxOpCo. La première aspire donc les bénéfices de la seconde, via le mécanisme des <a href="http://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/cercle-88330-les-nouvelles-regles-fiscales-sur-les-prix-de-transfert-1001664.php" target="_blank">prix de transfert</a>.<br />
Toute cette construction juridique est bien sûr hautement contestable. Mais seule la dernière partie est contestée. La DG concurrence de la Commission européenne critique un ruling fiscal de 2003, qui a défini les redevances payées entre les deux entités.<br />
Ce dont on discute, plus précisément, c'est la méthode utilisée pour calculer la valeur des royalties payés chaque année par LuxOpCo à Lux SCS. Le fisc luxembourgeois a approuvé un forfait annuel fixé en dehors de toute réalité économique. La Commission européenne le qualifie d'"arrangement cosmétique".<br />
Les discussions entre la Commission et le Grand-Duché se poursuivront dans les prochains mois, en vue d'une décision au printemps. Le Luxembourg pourrait être condamné à réclamer des sommes considérables à Amazon au titre de l'impôt non perçu, requalifié en aide d'Etat illégale.<br />
Cette évolution est bienvenue, mais elle doit nous amener à aller plus loin. D'abord, elle doit nous faire comprendre définitivement qu'une <a href="http://www.redistributions.eu/2014/12/lharmonisation-fiscale-pour-les-nuls.html" target="_blank">harmonisation fiscale est indispensable</a>. Il est temps de cesser de considérer les multinationales comme des dizaines d'entités distinctes. Leur bénéfice doit être consolidé et réparti selon des critères clairs. L'incroyable complexité des prix de transferts les rend trop facilement manipulables, et les administrations fiscales ne sont pas équipées pour vérifier leur validité.<br />
Nous devons aussi tirer les conséquences politiques de cette affaire. Jean-Claude Juncker s'est toujours défendu d'avoir joué le jeu de la concurrence fiscale déloyale. Après les LuxLeaks, il assurait, en outre, n'avoir jamais donné d'instructions à l'administration fiscale. Cette version ne tient pas vraiment la route.<br />
En 2003, devant le parlement luxembourgeois, il se vantait d'avoir favorisé l'implantation d'Amazon au Luxembourg à travers des négociations. "<i>Qu'AOL et <span class="highlighted-text">Amazon</span> viennent au
Luxembourg, et que grâce à cela nous obtenions une nouvelle perspective
d'avenir, est le résultat d'une politique fiscale appropriée, d'une
politique d'infrastructure appropriée, mais aussi le résultat de
difficiles négociations avec le top management de ces groupes"</i>,
déclarait-il à l'époque. "<i>Ces discussions ont eu lieu en Amérique, elle ont
eu lieu ici, et je ne les ai pas conduites tout seul</i>", ajoutait-il,
d'après des propos exhumés récemment par le <a href="http://www.wsj.com/articles/juncker-defends-his-record-over-luxembourg-tax-1415795522" target="_blank">Wall Street Journal</a>.<br />
Si ces négociations n'ont pas porté sur le traitement fiscal de l'entreprise, quelle était leur nature ? Se limitaient-elles à "l'aide pour la relocalisation des employés, notamment pour l’expédition des visas et la scolarité des enfants", comme l'affirme l'ancien CFO de l'entreprise dans cette <a href="http://www.land.lu/2014/08/22/une-merveilleuse-amiti%C3%A9-%E2%80%A9/" target="_blank">interview</a> ? On peine à la croire. Comment se fait-il que le fisc luxembourgeois ait approuvé en onze jours le montage proposé par Amazon, un délai jugé trop court pour conduire une véritable analyse économique (voir point 63 de la <a href="http://ec.europa.eu/competition/state_aid/cases/254685/254685_1614268_71_2.pdf" target="_blank">décision</a>) ? N'y a-t-il eu aucune interférence politique ?<br />
Voilà des questions que les eurodéputés pourraient poser au président de la Commission, s'il se présente devant leur future <a href="http://www.lemonde.fr/economie/article/2015/01/15/luxleaks-le-parlement-europeen-veut-mettre-en-place-une-commission-d-enquete_4556635_3234.html" target="_blank">commission d'enquête</a>.<br />
Reconnaître la nature profondément déloyale pratiquée par le Luxembourg quand il était Premier ministre, voilà un geste qui honorerait Jean-Claude Juncker. Bien sûr, il n'est pas le seul. L'Irlande, la Belgique, les Pays-Bas pratiquent eux aussi le dumping fiscal. Mais en prenant clairement ses distances avec son passé, M. Juncker redeviendrait crédible sur les politiques que sa Commission entend mener demain pour harmoniser l'impôt des sociétés.<br />
<br />Unknownnoreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3619764298792448838.post-75333210839356618102014-12-23T16:53:00.000+01:002014-12-25T22:59:28.552+01:00L'harmonisation fiscale pour les nulsL'harmonisation fiscale européenne serait-elle de retour ? Depuis des années, on nous assure qu'il serait complètement irréaliste d'aligner l'impôt entre pays européens. La règle de l'unanimité, nous expliquait-on, rend impossible de trouver un accord sur une question aussi sensible. Mais les Luxembourg Leaks ont remis la question à l'ordre du jour.<br />
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<a href="http://www.debout-la-republique.fr/sites/default/files/tribune/864ee6d2-dbe7-42df-94c0-7192a2de4a24_mw1024_s_n.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="http://www.debout-la-republique.fr/sites/default/files/tribune/864ee6d2-dbe7-42df-94c0-7192a2de4a24_mw1024_s_n.jpg" height="300" width="400" /></a></div>
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Critiqué pour son rôle quand il était Premier ministre du Luxembourg, Jean-Claude Juncker, assure désormais que "<i>l'harmonisation fiscale est une nécessité absolue</i>", et une priorité de son mandat à la tête de la Commission européenne. Ne dit-on pas que les braconniers font les meilleurs garde-chasse ? Les prochaines années permettront de le vérifier.<br />
Mais de quoi parle-t-on, en fait ? Je vous propose un petit tour de la question - en mode pédagogique.<br />
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<b>Harmoniser le taux ou l'assiette ?</b><br />
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Avant de commencer, tordons le cou à un malentendu: l'harmonisation dont on parle pour les sociétés, à l'heure actuelle, ce n'est pas celle des <i>taux</i>. L'Europe ne doit pas décider, par exemple, que tous les bénéfices seraient taxés à 25% partout sur le continent, ni même dans une fourchette de 15% à 30%. Peut-être cette question se posera-t-elle un jour, mais nous n'en sommes pas là.<br />
Ce qu'on doit harmoniser d'abord, c'est l<i>'assiette</i>.<br />
L'assiette (ou base imposable), c'est ce sur quoi porte l'impôt. Celle de la TVA, par exemple, c'est grosso modo toutes les transactions commerciales. Cette assiette TVA est harmonisée en Europe depuis longtemps. Plusieurs directives ont établi des listes de bien et services tombant dans telle ou telle catégorie de taxe sur la valeur ajoutée. A partir de ce socle commun, chaque Etat reste libre d'imposer le taux de son choix, avec toutefois un plancher de 15% pour le taux normal.<br />
Pour l'impôt des sociétés, c'est plus compliqué. L'assiette, ici, c'est l'ensemble des règles qui permettent de calculer le bénéfice imposable d'une société. Une fois que ce bénéfice est établi, un taux est appliqué: plus de 30% en Belgique, France, Allemagne; environ 15% dans les ancien pays communistes; autour de 25% dans la zone nordique (Pays-Bas, Royaume-Uni, Scandinavie); et autour de 10% en Irlande, à Chypre et en Bulgarie.<br />
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<a href="http://idata.over-blog.com/1/53/99/06/photos6/IS-Europe.png" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="http://idata.over-blog.com/1/53/99/06/photos6/IS-Europe.png" height="276" width="400" /></a></div>
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Le taux, c'est l'élément le plus facile à comprendre, et donc on se focalise beaucoup sur lui. Mais comme je vous le disais au début, c'est l'assiette qui mérite notre attention. D'abord, pour la bonne raison que qu'il est impossible de fixer un taux commun si on n'a même pas encore déterminé sur quoi ce taux allait porter. Ça serait mettre la charrue avant les boeux.<br />
Mais aussi parce qu'aujourd'hui, c'est avant tout en jouant sur l'assiette que les grosses entreprises parviennent à ne pas payer d'impôt. Google et consorts ne sont pas établis en Irlande parce que le taux est de 12,5%. Ces multinationales paient en réalité beaucoup moins !<br />
Aujourd'hui, chaque Etat dispose en effet d'une multitude d'exonérations qui permettent aux entreprises de réduire fortement la base sur laquelle l'impôt sera prélevé au final. C'est le cas, par exemple, des <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Int%C3%A9r%C3%AAts_notionnels" target="_blank">intérêts notionnels</a> en Belgique, grâce auxquels certaines sociétés ont pu exonérer 100% de leur bénéfice. Les LuxLeaks ont montré que dans certains montages, l'assiette de sociétés était réduite de 95% a Luxembourg. Quand peine 5% du bénéfice est taxé, le taux n'a plus tant d'importance...<br />
Une méthode unique de calcul de l'assiette en Europe permettrait donc de limiter les possibilités d'optimisation agressive. J'y reviendrai plus loin. Avant cela, faisons un petit détour par l'histoire pour mieux comprendre les origines du système actuel.<br />
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<b>Un petit retour aux origines</b><br />
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Depuis que l'impôt sur le bénéfice des sociétés a été inventé, au début du 20e siècle, il s'est développé de façon autonome dans chaque Etat. Dès le départ, des différences apparaissent dans le traitement des premières multinationales: faut-il taxer l'ensemble des bénéfices mondiaux dans le pays de siège ? Faut-il, au contraire, qu'une partie du bénéfice soit allouée à chaque pays d'activité ? Où s'établit le siège d'une société, alors qu'on voit se développer les premiers paradis fiscaux ?<br />
Chaque Etat apportera une réponse différente, en fonction de ses intérêts. Les pays exportateurs de capital, comme le Royaume-Uni encore auréolé de sa puissance impériale, privilégieront <i>la taxation basée sur la résidence. </i>Autrement dit: ils voudront taxer chez eux les revenus mondiaux de "leurs" multinationales. Les autres Etats privilégieront une <i>taxation</i> <i>à la source</i>: c'est-à-dire qu'ils exigeront de pouvoir taxer eux aussi la richesse pompée sur leur territoire, sans tout laisser au pays de siège de la société.<br />
Dès le départ, on se retrouve donc avec une prolifération chaotique de règles fiscales. Les premières à s'en plaindre, ce seront les multinationales elles-mêmes. Car si aujourd'hui elles arrivent à profiter au mieux du patchwork international, à l'époque elle subissent surtout une double taxation.<br />
Leur lobbying précoce dictera l'agenda politique pendant des décennies: pour empêcher la double taxation de bénéfices, les Etats vont s'employer à conclure des milliers de conventions bilatérales.<br />
On n'ira jamais plus loin en matière d'harmonisation: des tentatives isolées au sein de la Ligue des Nations (l'ancêtre des Nations Unies) dans les années 20 et 30 resteront lettre morte. Il n'y aura donc aucun cadre de référence pour les fiscalité internationale. Seul existe, jusqu'à aujourd'hui, un mic-mac de traités bilatéraux.<br />
Faute d'unification, les Etats restent donc des petits îlots de souveraineté, alors que les opérateurs économiques sont mondialisés. Or, cette souveraineté s'avère être de plus en plus factice. En perfectionnant sans cesse leurs techniques comptables, les grosses sociétés réussissent à faire glisser leurs bénéfices d'un pays à l'autre pour réduire à pas grand chose leur facture fiscale, sans que les Etats puissent y faire grand chose. <br />
Dans le jargon, on parle d'"érosion de la base imposable et transfert de bénéfices" (BEPS de son petit nom anglais, pour <i>base erosion and profit shifting</i>). Dans certains cas, on est même arrivé à un retournement complet de situation par rapport au début du 20e siècle. Il n'est plus question de double imposition, mais de "double non-imposition". Les entreprises ne sont plus taxées dans deux pays, elles ont réussi à n'être taxées dans aucun! En ce début de 21e siècle, c'est le problème sur lequel se cassent la tête les Etats et leurs experts fiscaux.<br />
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<b>Fiction comptable</b><br />
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Récapitulons. Les multinationales vivent donc aujourd'hui dans une fiction comptable: un conte de fées dans lequel elles se divisent en des dizaines, centaines ou même parfois milliers d'entités (filiales, branches et autres) dans divers pays. Cet éclatement ne reflète évidemment pas la réalité. En vrai, il y a un centre de direction ultime et des bénéficiaires bien déterminés.<br />
Les relations entre toutes ces entités sont censées être réglées harmonieusement par une règle simple: le principe de pleine concurrence. Il prévoit que les prix pratiqués entre toutes ces entités (les "prix de transfert") doivent refléter les conditions du marché. Pas question, en théorie, qu'une filiale surfacture ou offre un généreux rabais à une autre. En anglais, c'est plus visuel: on dit que les entités doivent être bien distinctes, comme indépendantes, maintenues à distance de bras (<i>at arm's length</i>). En jargon, on parle donc du <a href="http://en.wikipedia.org/wiki/Arm%27s_length_principle" target="_blank">arm's length principle</a> - dites ALP.<br />
Mais qu'on parle de bras ou de pleine concurrence, c'est seulement de la théorie. Dans la réalité, ces prix de transfert sont très éloignés des vraies conditions de marché. Ils sont d'autant plus faciles à manipuler que nous vivons dans une économie complexe, financiarisée et dématérialisée. Quel est le juste prix à appliquer à l'utilisation de la marque McDonald's ? Quelles est la valeur réelle d'un swap sur taux d'intérêt ? Combien coûtent réellement les services rendus par l'administration centrale d'une entreprise au bénéfice des filiales ? Il y a une large marge d'appréciation, et les multinationales en profitent à plein pot. Leur méthode est toujours la même: baisser le bénéfice dans les pays lourdement taxés, le déplacer dans les pays faiblement taxés, ou mieux, dans un paradis fiscal comme les Bermudes. La recette est désormais bien connue. Les LuxLeaks n'ont fait que confirmer une fois pour toute ce que tout le monde sait depuis longtemps.<br />
Jusque récemment, les Etats se souciaient peu de cette situation. Un peu par souci de compétitivité, un peu parce qu'aucun politicien ne s'intéressait à ces questions complexes, beaucoup de petits pays ne se sont même jamais dotés de règles basiques pour éviter que les prix de transfert soient grossièrement manipulés. La Belgique a longtemps traîné. L'Irlande et le Luxembourg ne le font que maintenant. Leur négligence a coûté des dizaines de milliards d'euros à leurs trésors publics.<br />
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<b>Les solutions</b><br />
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Depuis la crise financière, heureusement, l'heure n'est plus à la négligence. Si pendant quelques années, après 2008, on a pu penser que rien ne changerait, il existe aujourd'hui un vrai climat de réforme fiscale internationale. Et réforme, il y aura. La question est de savoir si elle ira assez loin.<br />
On ne vous rien dit dans les médias (pour la bonne raison que beaucoup de journalistes n'y comprennent rien) mais deux approches sont en présence. Il faut bien les distinguer.<br />
D'un côté, nous avons l'OCDE, incarnée ici par son directeur pour la fiscalité, Pascal Saint-Amans. Cette organisation consultative, parfois qualifiée de club de pays riches, était doucement en train de tomber en désuétude, quand elle a réussi à se refaire une réputation sur la question fiscale. Autrefois surtout soucieuse de libéraliser à tour de bras, l'OCDE a saisi l'esprit du temps: elle est désormais la championne de la réforme fiscale internationale.<br />
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<a href="http://www2.pictures.zimbio.com/gi/Pascal+Saint+Amans+G20+Finance+Ministers+Meet+ry6hX5i7R_Ul.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="http://www2.pictures.zimbio.com/gi/Pascal+Saint+Amans+G20+Finance+Ministers+Meet+ry6hX5i7R_Ul.jpg" height="266" width="400" /></a></div>
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Pascal Saint-Amans ne ménage pas ses efforts. Régulièrement invité par les dirigeants du G20 à faire le point sur ses travaux, il porte un <a href="http://www.oecd.org/ctp/BEPSActionPlan.pdf" target="_blank">programme de réformes</a> en quinze points, dont certaines ne sont absolument pas cosmétiques. Il a déjà réussi, par exemple, à faire supprimer une des formes les plus usitées de montage fiscal agressif, les hybrides (voir <a href="http://www.euractiv.fr/sections/euro-finances/malte-se-plie-lavis-general-en-matiere-devasion-fiscale-302996" target="_blank">ici</a>). Il travaille aussi à un grand traité multilatéral qui s'imposerait aux traités bilatéraux (voir <a href="http://www.euractiv.fr/sections/euro-finances/malte-se-plie-lavis-general-en-matiere-devasion-fiscale-302996" target="_blank">ici</a>).<br />
Ce sont d'indéniables progrès, mais sont-ils suffisants ? On peut craindre que non. L'action de l'OCDE risque même de détourner l'attention de l'autre approche envisagée pour rendre plus juste la fiscalité internationale: l'harmonisation de l'assiette de l'impôt des sociétés.<br />
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<b>L'ACCIS, acronyme compliqué, solution simple</b><br />
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Nous revoilà donc face à l'harmonisation fiscale, dont je vous parlais au début de ce billet. En Europe, elle est connue sous l'acronyme barbare d'ACCIS, pour <i>Assiette commune consolidée pour l'impôt des sociétés</i>. En anglais, on dira<i> Common consolidated corporate tax base</i>, ou CCCTB. A vos souhaits.<br />
Le principe, en réalité, est simple. Plutôt que d'accepter la fiction selon laquelle les multinationales seraient morcelées en de nombreuses entités, on admettrait enfin qu'elles sont une seule et même organisation. Leur bénéfice, du coup, serait comptabilisé pour toute l'Union avec une seule et même méthode de calcul. On pourrait encore, si on veut, décider de permettre la déduction des activités de recherche et développement, mais de façon uniforme. Plus question de mesure octroyée en douce par un gouvernement pour favoriser la délocalisation d'une entreprise.<br />
Ce bénéfice unique serait ensuite réparti entre les différents pays selon des critères objectifs: les ventes, le personnel et ce qu'on appelle des immobilisations (par exemple la valeur des immeubles). Plus question de déplacer le bénéfice selon des artifices comptables. Cette répartition simple entre pays est connue sous le doux nom de <i><a href="http://en.wikipedia.org/wiki/Formulary_apportionment" target="_blank">formula apportionment</a></i>.<br />
Chaque Etat, enfin, serait libre d'appliquer le taux de son choix sur sa part du gâteau. Il resterait donc une marge pour la concurrence fiscale. Cette concurrence deviendrait seulement plus transparente.<br />
L'ACCIS n'a rien de neuf. La Commission européenne y travaille depuis plus de dix ans. Elle a même déposé une <a href="http://ec.europa.eu/taxation_customs/taxation/company_tax/common_tax_base/index_en.htm" target="_blank">proposition législative formelle</a> en 2011. Pourquoi alors, me direz-vous, n'applique-t-on pas déjà cette solution miracle ?<br />
L'une des réponses est que les Etats ne veulent pas abandonner leur souveraineté fiscale. C'est particulièrement le cas de l'Irlande, où toute la classe politique est vent debout contre l'ACCIS. En Belgique, personne n'en parle. Le pays aime se profiler comme un pro-harmonisation européenne, mais la réalité est beaucoup plus nuancée. La fédération des entreprises FEB milite contre le projet. Le nouveau ministre des Finances, Johan Van Overtveldt veut "<i>y aller avec prudence en matière d'harmonisation fiscale</i>". <i>"Nous faisons partie de l'union monétaire et nous disposons par conséquent d'un arsenal politique limité lorsqu'il s'agit de réagir à un choc économique</i>", a insisté à la Chambre le ministre N-VA. Dès lors, "<i>il est peut-être indiqué de ne pas abandonner trop facilement, et de ne pas perdre un instrument de politique économique qualifié par d'aucuns de politique de niches</i>".<br />
Ce n'est donc pas gagné, d'autant plus que règne en Europe la fameuse règle de l'unanimité. Chacun des 28 Etats membres doit marquer son accord à une réforme fiscale. <br />
Malgré les difficultés, ce projet ACCIS mériterait un peu d'attention dans le débat public. Si on veut cesser de s'indigner chaque fois qu'une multinationale échappe à l'impôt, on serait bien inspiré de bâtir un système solide qui permette une taxation efficace, transparente et juste. La volonté affichée par Jean-Claude Juncker de relancer l'harmonisation est donc la bienvenue. Faut-il y voir juste une manière de faire baisser la pression après l'affaire des LuxLeaks ? Ou deviendra-t-il réellement un braconnier repenti ? L'avenir le dira. Mais il est certain que la justice fiscale ne progressera que si l'opinion publique reste mobilisée.<br />
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J'espère, avec ce billet, vous avoir aidé à mieux comprendre un enjeu auquel trop peu de gens s'intéressent de par sa complexité. (N'hésitez pas à pointer tout manque de clarté dans le texte, je m'efforcerai d'y remédier).<br />
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<b>Pour aller plus loin</b>:<br />
Le livre International Business Taxation, de Sol Picciotto, <a href="http://www.taxjustice.net/cms/upload/pdf/Picciotto%201992%20International%20Business%20Taxation.pdf" target="_blank">accessible librement</a>, est une référence absolue. Bien que technique, daté (1992) et en anglais, il est, à ma connaissance, la meilleure source pour ceux qui veulent comprendre l'histoire de l'impôt des sociétés.Unknownnoreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3619764298792448838.post-68529135318624010632014-12-08T12:04:00.004+01:002014-12-08T21:38:56.326+01:00"Only in Belgium": comment la Belgique fait sa promotion de pays "low tax" auprès des investisseurs<div style="-x-system-font: none; display: block; font-family: Helvetica,Arial,Sans-serif; font-size-adjust: none; font-size: 14px; font-stretch: normal; font-style: normal; font-variant: normal; font-weight: normal; line-height: normal; margin: 12px auto 6px auto;">
La presse flamande <a href="http://m.standaard.be/cnt/dmf20141207_01417457" target="_blank">relaie</a> lundi cette brochure en ligne de promotion de la Belgique comme un pays fiscalement avantageux pour les investisseurs étrangers. Parmi les avantages mis en avant: le service de rulings, avec ses "business minded tax professionals", dont les décisions, est-il précisé, lient les inspecteurs des impôts. </div>
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<div style="-x-system-font: none; display: block; font-family: Helvetica,Arial,Sans-serif; font-size-adjust: none; font-size: 14px; font-stretch: normal; font-style: normal; font-variant: normal; font-weight: normal; line-height: normal; margin: 12px auto 6px auto;">
<a href="https://www.scribd.com/doc/249442960/Unique-tax-incentives-in-Belgium" style="text-decoration: underline;" title="View ‘Unique tax incentives in Belgium’ on Scribd">‘Unique tax incentives in Belgium’</a> by <a href="https://www.scribd.com/destandaard" style="text-decoration: underline;" title="View De Standaard's profile on Scribd">De Standaard</a></div>
<iframe class="scribd_iframe_embed" data-aspect-ratio="1.3323485967503692" data-auto-height="false" frameborder="0" height="600" id="doc_2252" scrolling="no" src="https://www.scribd.com/embeds/249442960/content?start_page=1&view_mode=scroll&access_key=key-M2EEvetOOV3p1kTMtUQa&show_recommendations=true" width="100%"></iframe><br />
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En réalité, l'administration fiscale peut contester des décisions anticipées sous certaines conditions, comme l'a montré l'inspection spéciale des impôts (ISI) en <a href="http://www.lalibre.be/economie/actualite/les-accords-de-ruling-conclus-par-ab-inbev-contestes-par-le-fisc-belge-546448f63570a5ad0ee2c655" target="_blank">ouvrant une enquête</a> sur un montage fiscal d'Inbev. La disposition générale anti-abus, adoptée sous le précédent gouvernement, donne des armes au fisc pour combattre les montages abusifs des multinationales. Mais chut! Mieux vaut ne pas le dire aux investisseurs !<br />
Avant que cela ne se sache, le gouvernement Michel a d'ailleurs mis sur les rails des travaux législatifs pour recadrer la loi anti-abus. La coalition suédoise veut aussi renforcer l'indépendance du service de ruling et de ses "business minded professionals" face à des inspecteurs de l'ISI par trop tatillons...Unknownnoreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3619764298792448838.post-91870404037148578782014-12-02T13:01:00.000+01:002014-12-02T16:13:38.300+01:00"Dumping fiscal" au LuxembourgJ'étais invité la semaine dernière par la <a href="http://grengsteftung.lu/?lang=fr" target="_blank">Gréng Stëftung</a> à présenter mon <a href="http://www.redistributions.eu/2014/04/dumping-fiscal-enquete-sur-un-chantage.html" target="_blank">livre sur le dumping fiscal</a> au Luxembourg. Quelques mois après sa sortie, il y bénéficie d'un regain d'intérêt lié à l'actualité récente. Les LuxLeaks a braqué les projecteurs sur le pays au moment où il s'efforce de se débarrasser de cette collante étiquette de paradis fiscal. Il y avait donc un certain appétit à débattre de l'affaire, mais aussi à entendre parler des autres pays qui s'adonnent joyeusement à la concurrence fiscale, comme je l'ai fait dans ma <a href="https://drive.google.com/file/d/0B-8Biv_CX1ocR21hQlJUeUhFazQ/view?usp=sharing" target="_blank">présentation</a> !<br />
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<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgb0p3omB4KKxBtpaP4W4ugU3uuHVIYL4hkgthYklgCDoDJcqcT0fAuG8t4reFf4CvBSrrzZzD7l9j-mD502sCNZVee_mzIRAt0Y4dUNNN-VHeLbwLKYkydEDehLZKXAXBAm2GRpBd0fwSJ/s1600/P1040428.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgb0p3omB4KKxBtpaP4W4ugU3uuHVIYL4hkgthYklgCDoDJcqcT0fAuG8t4reFf4CvBSrrzZzD7l9j-mD502sCNZVee_mzIRAt0Y4dUNNN-VHeLbwLKYkydEDehLZKXAXBAm2GRpBd0fwSJ/s1600/P1040428.jpg" height="266" width="400" /></a></div>
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Le débat qui a suivi a tourné autour de questions passionnantes, auxquelles je n'ai pu apporter que quelques éléments de réponse: le Luxembourg vit-il sur le dos de ses voisins ? Que gagnent réellement les Luxembourgeois de la stratégie fiscale suivie par leurs gouvernements successifs ? S'ils abandonnent les niches fiscales, quelles stratégies peuvent suivre les petits pays pour ne pas devenir un simple hinterland des grands Etats ? <br />
Ces questions ont également été évoquées dans les articles de presse qui ont rendu compte de la conférence (voir <a href="https://drive.google.com/file/d/0B-8Biv_CX1ocaGU4c1N0dXZIMWM/view?usp=sharing" target="_blank">ici</a> en français dans Le Quotidien et <a href="http://www.wort.lu/de/politik/diskussionsabend-der-greng-steftung-von-luxem%20burg-und-anderen-steuerparadiesen-5478a8120c88b46a8ce41ecf" target="_blank">ici</a> en Allemand dans le Luxemburger Wort). <br />
Que ces questions soient posées ouvertement marque une évolution des esprits au Grand-Duché, où les enjeux fiscaux dérangeants ont jusqu'à présent toujours été balayés sous le tapis épais du consensus national. Un débat ouvert menace sans doute la stabilité fiscale du pays, chère au secteur financier et aux investisseurs, mais il est une condition préalable à une fiscalité plus juste.<br />
Le débat sur les LuxLeaks devrait continuer d'agiter la vie politique du pays dans les prochaines semaines. Un député du parti de gauche Dei Lenk, Justin Turpel, semble en tout cas décidé à jouer les trouble-fête. Il a adressé au gouvernement une <a href="https://drive.google.com/file/d/0B-8Biv_CX1oceXVFejAyUXFaeVk/view?usp=sharing" target="_blank">longue liste de questions</a> sur la pratique des rulings. Les réponses qu'apportera la majorité de Xavier Bettel ne manqueront pas d'intéresser les Luxembourgeois, mais aussi la communauté internationale. Unknownnoreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3619764298792448838.post-54716172360036501762014-11-21T16:57:00.000+01:002014-11-21T17:26:30.960+01:00Prosommateurs de tous les pays, unissez-vous !Il ne se passe plus une semaine sans que les médias n’ouvrent leurs pages à l’économie collaborative, incarnée par AirBnb, Uber, BlaBlaCar ou KissKissBankBank. C'est que le partage sur internet n’a plus rien d’une affaire de geeks ou de couchsurfers fauchés. Ces nouveaux outils changent nos manières de voyager, de nous déplacer, de financer nos projets. AirBnb s’enorgueillit de mettre à disposition 800.000 logements à travers le monde, et compte plus de vingt millions d’usagers. Uber est devenu une alternative au taxi dans 200 villes du monde. BlaBlaCar, une société française pionnière du covoiturage, a passé en septembre le cap de dix millions de membres. Elle transporte aujourd’hui plus de passagers qu’Eurostar! <br />
Forbes estimait, début 2013, que les acteurs de l’économie collaborative empocheraient sur l’année 3,5 milliards de dollars, en hausse de 25%. "A ce rythme", écrivait le magazine spécialisé dans la mesure de la richesse, "le partage en peer-to-peer cesse d’être un simple revenu complémentaire (...) pour devenir une vraie force économique disruptive" (<a href="http://www.forbes.com/sites/tomiogeron/2013/01/23/airbnb-and-the-unstoppable-rise-of-the-share-economy/" target="_blank">ici</a>).<br />
A écouter ses promoteurs, cette nouvelle économie promet des lendemains qui chantent, faits de partage, d’innovation sociale et de désintermédiation. Elle permettrait de relier davantage les être humains, tout en polluant et en payant moins. "Ses stars se qualifient de gourous, d’<i>inspirationnal thinker</i>, de <i>thought leader</i> et, bien entendu, sont souvent à la tête d’au moins une start-up à succès", ironise le journaliste Jean-Laurent Cassely dans un <a href="http://www.slate.fr/story/90333/economie-collaborative-partage" target="_blank">article</a> récent de Slate. Le célèbre prospectiviste américain Jeremy Rifkin, semble avoir pris la tête des enthousiastes. Dans son dernier essai, baptisé <a href="http://www.editionslesliensquiliberent.fr/livre-La_nouvelle_soci%C3%A9t%C3%A9_du_co%C3%BBt_marginal_z%C3%A9ro-400-1-1-0-1.html" target="_blank">La nouvelle société du coût marginal zéro</a>, il prophétise une révolution collaborative qui abolira le capitalisme, rien de moins. Celui-ci tourne grâce à des investissements massifs qui sont ensuite rémunérés avec les gains procurés par les économies d'échelle, souligne Rifkin. En permettant à chacun de devenir producteur pour un investissement proche de zéro, les nouveaux outils collaboratifs changent complètement la donne: chacun peut désormais devenir un prosommateur - contraction de producteur et consommateur. A terme, les individus reprendront donc le pouvoir sur les grandes entreprises. Car les plateformes de partage ne bouleverseront pas que l’hébergement touristique ou les transports en voiture. Le crowdfunding, en pleine croissance lui aussi, permet déjà de contourner les acteurs bancaires traditionnels. Et dans un avenir pas trop éloigné, l’énergie sera vendue de gré à gré entre producteurs individuels grâce aux réseaux intelligents, tandis que les <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Fab_lab" target="_blank">Fab Labs</a> et imprimantes 3D rapatrieront la production de l’usine au domicile.<br />
Tout cela fleure bon l’utopie. Mais après tout, pourquoi pas ? En ces temps maussades de crise économique et de perte de repères collectif, la perspective de liens directs tissés entre les individus a de quoi séduire.<br />
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<b>La fin du capitalisme, vraiment ?</b><br />
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A bien y regarder, l’économie du partage est pourtant bien éloignée du JPEG d’Epinal qu’on serait enclin à partager d’un clic paresseux. Si elle révolutionne nos modes de consommation, elle ne s’accompagne pas nécessairement d’un partage des outils. Au contraire, elle voit émerger de nouvelles multinationales qui n’ont rien de coopératives. En juillet, BlaBlaCar a ainsi levé 100 millions de dollars auprès de fonds d’investissement. L’ex Covoiturage.fr affiche désormais son ambition de "developper le covoiturage urbain à l’échelle mondiale". Au passage, il a truffé son site de tarifs cachés, au point qu’un utilisateur dégoûté n’hésite pas à <a href="http://blogs.mediapart.fr/blog/evenstrood/200614/blablacar-le-covoiturage-tue-par-la-finance-et-l-appat-du-gain" target="_blank">affirmer</a> que le covoiturage a été "tué par la finance et l’appât du gain".<br />
De l’autre côté de l’Atlantique, les deux géants de la <i>share economy</i> font aussi tourner la tête des investisseurs. En avril dernier, le fonds Texas Pacific Group a investi 450 millions de dollars dans AirBnb, désormais évaluée à plus de 10 milliards. Uber fait également partie du club prisé des valeurs à 11 chiffres, boostée par les investissements de Google et Goldman Sachs.<br />
Nouveaux venus du capitalisme 2.0, les géants du collaboratif adoptent les méthodes de leurs aînés. A l’instar de Google, ils ont mis en place des montages qui leur permettent de réduire à peau de chagrin leur facture fiscale. La structuration internationale d’AirBnb est un modèle du genre (lire notamment <a href="http://bfmbusiness.bfmtv.com/entreprise/exclu-bfm-business-airbnb-echappe-a-limpot-812951.html" target="_blank">ceci</a>). Bien que basée à San Francisco, la société est légalement établie au Delaware, le paradis fiscal intra-américain. Hors-USA, tous les paiements sont acheminés vers une filiale irlandaise, très discrète sur ses bénéfices et vraisemblablement peu taxée. Même opacité du côté des trois filiales ouvertes l’an dernier à Jersey, un autre paradis fiscal notoire. Le service de presse de la firme est particulièrement laconique: "AirBnb paie ses impôts dans tous les pays où elle est établie". Le problème, c’est qu’elle n’est pas établie en Belgique, ni dans beaucoup de pays! Toute virtuelle, elle empoche donc ses commissions sans reverser un centime à l’Etat. Sans non plus accepter de dévoiler quoi que ce soit sur son chiffre d’affaires, ses bénéfices et les éventuels impôts qu’elle paierait ailleurs. Le partage, visiblement, ne s’applique pas aux bénéfices, ni à l’information.<br />
Uber, quant à elle, a bien établi une <a href="http://kbopub.economie.fgov.be/kbopub/toonondernemingps.html?ondernemingsnummer=501967674" target="_blank">filiale</a> en Belgique, nécessaire sans doute vu les relations contractuelles plus poussées qui l’unissent à ses conducteurs. Cette petite société a enregistré de légères pertes en 2012 et 2013 et n’a donc payé aucun impôt non plus. Il s’agit clairement d’une coquille quasi-vide destinée à gérer la promotion et les aspects administratifs. Quelle est la taille de son activité réelle de taxi, dématéralisée par la magie du web ? Difficile de le dire, car la société cultive elle aussi le secret. Impossible d’obtenir une information sur le chiffre d’affaires que brasse la centaine de chauffeurs revendiqués à Bruxelles. Les autorités de la Capitale ne disposent d’aucun chiffre.<br />
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La route qui permet à Uber de défiscaliser les revenus tirés des activités de taxis est néanmoins plus ou moins connue des experts. Elle ressemble furieusement à celle qu'utilise son actionnaire Google. L'argent payé à travers l'application, perçu au nom des chauffeur, leur est intégralement reversé. Ce sont eux, en fait, les contribuables redevables de l'impôt dans leur pays d'activité. Mais ils ristournent ensuite une commission de 20% à Uber BV<i>, </i>une <a href="http://www.kvk.nl/orderstraat/bedrijf-kiezen/?q=55808646#!shop?&q=55808646&start=0&prefproduct=&prefpayment=" target="_blank">filiale</a> immatriculée aux Pays-Bas. En vertu de la loi néerlandaise, très favorable aux redevances (<i>royalties</i>), cette filiale ne paie d'impôt que sur 7% des montants perçus, ce qui correspond à un taux d'impôt réel d'environ 2%. Les montants sont ensuite remontés vers une filiale aux Bermudes, où l'impôt sur les sociétés est inexistant, avant de regagner les Etats-Unis, au Delaware, où ces redevances bénéficient d'un taux préférentiel. </div>
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<b>Prolétaires 2.0</b><br />
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Mais plus que son opacité fiscale, c’est la concurrence déloyale de la société de taxi qui est régulièrement dénoncée. Depuis des mois, partout en Europe, les taxis officiels protestent contre ces nouveaux concurrents qui offrent des tarifs ultra-bas en omettant bien souvent de payer impôts, cotisations sociales, assurances et licence d’agrément. A Londres, en juin dernier, des milliers de black cabs ont <a href="http://www.dailymail.co.uk/news/article-2768851/Black-cab-blockade-Hundreds-drivers-park-London-landmarks-including-Whitehall-Trafalgar-Square-protest-rise-unlicensed-minicabs-rickshaws.html" target="_blank">convergé</a> vers Trafalgar Square dans un concert de klaxons, mais Uber n’en a cure. Comme les coup d’éclat du patron de Ryanair, chaque épisode médiatique offre de la publicité gratuite à son modèle low cost et <a href="http://www.google.com/url?q=http%3A%2F%2Fwww.bruegel.org%2Fnc%2Fblog%2Fdetail%2Farticle%2F1464-uber-economics-there-is-no-such-thing-as-bad-publicity%2F&sa=D&sntz=1&usg=AFQjCNFuF_qcL2-43GTVMRFjA9nJHyL5Og" target="_blank">nourrit sa croissance</a>. La firme a bénéficié en outre du soutien très vocal de l'ancienne commissaire européenne aux télécoms, Neelie Kroes. Face aux critiques, la libérale néerlandaise a multiplié les prises de position pour défendre une entreprise en laquelle elle ne voit que dynamisme et innovation. "La plupart des industries n’ont pas la chance de faire partie de cartels légalisés, comme les taxis. Elles doivent embrasser le changement ou décliner (pensez à la décennie perdue de l’industrie musicale avec l’arrivée du téléchargement)", a-t-elle argumenté dans une tribune récente. Neelie Kroes ne laisse donc subsister aucun doute sur sa vision du rôle des nouvelles plateforme: il s’agit de déréguler les professions réglementées. Et celles-ci n’auront pas le choix, car "ces apps ne vont pas disparaître", prédit la commissaire.<br />
Cette évolution apparemment inéluctable pose une question, qui est au coeur des <a href="http://www.google.com/url?q=http%3A%2F%2Fwww.usine-digitale.fr%2Feditorial%2Fself-emploi-multi-activite-production-collaborative-la-fing-ausculte-les-nouvelles-formes-de-travail.N292980&sa=D&sntz=1&usg=AFQjCNG90i1WdJ5Aoloi6tZLux-vTq1Exw" target="_blank">débats</a> sur l’économie collaborative: "Nous dirigeons-nous vers un monde du self emploi ?" La Fondation française Fing évoque un nouveau modèle de travailleurs émergeant depuis quelques années, les "slashers", du nom de la barre oblique (slash) séparant leur multiples activités: un gagne-pain / une passion et/ou une activité dans l’économie collaborative. Ce panachage des revenus n’aurait rien d’anecdotique: les mini-jobs et des auto-entreprises, déjà très développés aux Etats-Unis, se multiplient aussi en Europe.<br />
Côté syndical, on refuse de cautionner une précarisation au nom des nouvelles technologies. "Ce n’est pas l’innovation qui est en jeu, contrairement à ce que prétend Neelie Kroes. Nous sommes pour l’innovation, mais avec certaines règles", affirme Frank Moreels (FGTB-UBT). Il appelle le secteur des taxis à investir pour développer ses propres outils pour smartphones.<br />
Les pouvoirs publics bruxellois sont eux aussi déterminés à ne pas accepter un fait accompli. Le nouveau ministre des transports, Pascal Smet, a relancé les contrôles et plusieurs véhicules ont été saisis. "Il est clair qu’Uber est illégal à Bruxelles pour l’instant", dit-il.<br />
Mais la révolte pourrait bien venir des travailleurs du collaboratifs eux-mêmes. A San Francisco, berceau de la société Uber, une trentaine chauffeurs ont spontanément débrayé le travail au printemps dernier - avec des revendications toutes traditionnelles en matière d’emploi et de salaire. "Ils gèrent un ‘sweatshop’ (usine aux conditions de travail misérables, ndlr) avec une appli. Ils n’ont même pas les c… de descendre pour nous rencontrer", a dénoncé au chauffeur à des journalistes au pied du siège de la firme.<br />
Aucune manifestation du genre n’a encore été observée en Europe. Pour Frank Moreels, ce n’est qu’une question de temps. "Après un temps, les chauffeurs vont se rendre compte que ce n’est pas le rêve qu’ils avaient", dit-il. Plutôt qu’avec des lendemains qui chantent, l’économie du partage pourrait se réveiller avec la gueule de bois.Unknownnoreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3619764298792448838.post-19026914953412769492014-11-19T17:44:00.001+01:002014-12-02T16:13:52.307+01:00Bettel, les Luxembourgeois, les crapules et les voyous"<i>L'ensemble de la population luxembourgeoise est révoltée qu'on veuille faire passer les Luxembourgeois pour des crapules et pour des voyous. C'est inacceptable</i>". Deux semaines après les LuxLeaks, le Premier ministre du Grand-Duché <a href="http://www.lecho.be/economie_politique/europe_general/Bettel_et_le_LuxLeaks_On_veut_nous_faire_passer_pour_des_crapules.9569123-3323.art" target="_blank">se pose</a> en défenseur de l'honneur offensé de ses compatriotes. Rhétorique classique pour un dirigeant de paradis fiscal - ou assimilé. Xavier Bettel flatte le sens national des Luxembourgeois, et donne à penser qu'ils se dressent comme un seul homme contre les agressions étrangères.<br />
Cette prétendue unanimité ne devrait tromper personne. Un micro-trottoir réalisé par la RTBF dans les rues de Luxembourg au lendemain du scandale laissait entrevoir que le ras-le-bol face aux pratiques d'optimisation fiscale agressive y était aussi vif qu'ailleurs. Et pourquoi ne le serait-il pas ? Les Luxembourgeois profitent-ils vraiment de leur place financière et des rulings pour multinationales ? Quand bien même ce serait le cas, approuvent-ils la stratégie fiscale agressive suivie par tous leurs gouvernements depuis des décennies ? Ces questions méritent d'être posées. Elles appellent des réponses nuancées.<br />
Indubitablement, les Luxembourgeois profitent de leur situation. Selon <a href="http://www.lesfrontaliers.lu/finances/quel-avenir-pour-le-secteur-financier-au-luxembourg" target="_blank">Deloitte</a>, la place financière contribue pour un tiers des recettes fiscales du pays. Ces rentrées permettent sans doute d'alléger un peu la fiscalité sur les personnes*. La place financière représente aussi 17% de l'emploi. Mais est-ce tant profitable que cela pour les locaux ? On peut en douter. En notant d'abord que plus de trois quarts de ces 65.000 emplois sont exercés par des étrangers. En observant aussi la <a href="http://www.gouvernement.lu/3322796/Programme-gouvernemental.pdf" target="_blank">volonté</a> du gouvernement Bettel d'"<i>attirer au Luxembourg de nouveaux contribuables</i>" (des étrangers, donc, qui paieront moins d'impôts chez eux), tout en relevant la TVA (payée surtout par les Luxembourgeois). C'est le principe d'un paradis fiscal: offrir des avantages aux étrangers, tandis que la population locale n'en profite qu'à la marge. Certains parlent même d'une "malédiction de la finance" (<a href="http://www.taxjustice.net/cms/upload/pdf/Finance_Curse_Final.pdf" target="_blank">"finance curse"</a>), comparable à la <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Maladie_hollandaise" target="_blank">maladie hollandaise</a> frappant les pays pétroliers: une source de richesse dominante entraîne une capture du processus politique par des intérêts privés et empêche le pays de diversifier son économie...<br />
Quel que soit le gain réel tiré par la population luxembourgeoise, approuve-t-elle les politiques fiscales qui sont menées ? Le pays est régi par des institutions démocratiques, donc on serait enclin à le penser. Mais la chose est plus nuancée. Il existe au Luxembourg une sorte de consensus national tacite sur la stratégie fiscale, que peu osent remettre en question.<br />
S'il semble naturel que la droite libérale, dont est issu le Premier ministre Xavier Bettel, soit acquise aux arguments de la place financière, on peut se poser des questions sur les autres partis. Malgré certains accents sociaux, la démocratie-chrétienne, incarnée par l'ancien Premier ministre Jean-Claude Juncker, fut le fer de lance de la transformation de ce petit pays industriel en centre financier international lors du dernier demi-siècle. Quant à la famille socialiste, souvent au gouvernement, elle a toujours préféré fermer les yeux, détournant le regard vers d'autres domaines plus proches de ses électeurs**. Seuls les Verts (désormais au gouvernement) et le parti de gauche radicale Déi Lénk osent un tant soit peu élever la voix. Mais leurs poids électoral est trop faible pour briser le plafond de verre.<br />
A leur invitation, je participerai la semaine prochaine à une <a href="http://grengsteftung.lu/?p=935" target="_blank">conférence</a> sur les Luxembourg Leaks et le ruling. Etant moi-même citoyen d'un pays qui pratique savamment le dumping fiscal -et dont le nouveau ministre des Finances veut <a href="http://www.lesoir.be/711500/article/actualite/belgique/politique/2014-11-19/van-overtveldt-veut-faire-bruxelles-un-centre-financier-international" target="_blank">transformer</a> la capitale en centre financier-, je m'abstiendrai de donner de leçons. Les crapules et les voyous, ce ne sont pas les Luxembourgeois, les Belges, les Irlandais, ni les citoyens d'autres paradis fiscaux. Ceux qu'il faut critiquer sont ceux qui conçoivent les règles, en profitent ou ferment les yeux.<br />
Les électeurs de nos pays doivent comprendre les enjeux de concurrence fiscale pour exiger des changements à leurs propres gouvernements, en préalable à une harmonisation européenne. Ce n'est qu'à ce prix qu'un système, dont tout le monde s'accorde à dire qu'il est injuste, pourra être réformé.<br />
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*Une rapide comparaison des fiscalités luxembourgeoise et belge montre que les recettes de l'impôt des sociétés pèsent 5,3% du PIB au Luxembourg (3e position européenne), mais seulement 3,1% en Belgique (5e). A contrario, l'impôt sur les personnes représente 8,6% du PIB au Luxembourg (10e), mais 12,7% en Belgique (4e). Voir <a href="http://ec.europa.eu/taxation_customs/resources/documents/taxation/gen_info/economic_analysis/tax_structures/country_tables/lu.pdf" target="_blank">ici</a> et <a href="http://ec.europa.eu/taxation_customs/resources/documents/taxation/gen_info/economic_analysis/tax_structures/country_tables/be.pdf" target="_blank">ici</a>.<br />
**Durant les recherches qui ont préparé la rédaction de mon <a href="http://www.redistributions.eu/2014/04/dumping-fiscal-enquete-sur-un-chantage.html" target="_blank">livre sur le Dumping fiscal</a>, j'ai questionné à ce sujet le socialiste Robert
Goebbels, qui occupa divers postes ministériels entre 1984 et 1999.
Voici ce qu'il m'en disait, il y a trois ans: "<i>Il y a plus
ou moins un consensus entre pratiquement tous les partis, à l'exception
peut-être du seul communiste que nous avons encore au parlement, pour
dire que la place financière est utile au pays, qu'elle permet des
revenus et surtout une création d'emploi qu'on n'aurait pas sans elle</i>".<br />
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Les sentiments
sont partagés, mais par contre tout le monde se rejoint sur un point:
l’ensemble de la population luxembourgeoise est révoltée qu’on veuille
faire passer les Luxembourgeois pour des crapules et pour des voyous.
Cela, c’est inacceptable.</div>
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sont partagés, mais par contre tout le monde se rejoint sur un point:
l’ensemble de la population luxembourgeoise est révoltée qu’on veuille
faire passer les Luxembourgeois pour des crapules et pour des voyous.
Cela, c’est inacceptable.<br />
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sont partagés, mais par contre tout le monde se rejoint sur un point:
l’ensemble de la population luxembourgeoise est révoltée qu’on veuille
faire passer les Luxembourgeois pour des crapules et pour des voyous.
Cela, c’est inacceptable.<br />
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sont partagés, mais par contre tout le monde se rejoint sur un point:
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sont partagés, mais par contre tout le monde se rejoint sur un point:
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faire passer les Luxembourgeois pour des crapules et pour des voyous.
Cela, c’est inacceptable.<br />
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sont partagés, mais par contre tout le monde se rejoint sur un point:
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faire passer les Luxembourgeois pour des crapules et pour des voyous.
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sont partagés, mais par contre tout le monde se rejoint sur un point:
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Unknownnoreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3619764298792448838.post-74588708518941303712014-11-09T18:48:00.005+01:002014-11-10T12:55:04.422+01:00Quelques réflexions sur les Luxembourg LeaksLa <a href="http://www.icij.org/project/luxembourg-leaks" target="_blank">révélation</a>, par un consortium de journalistes, de milliers de documents fiscaux incriminant le Luxembourg a fait l'effet d'une bombe. Mis en accusation par tous les journaux de la planète, le Grand-Duché voit réduits en cendres ses efforts pour se refaire une réputation ces dernières années.<br />
Comme la Suisse, le Luxembourg s'était résolu à abandonner son secret bancaire (avec un révolver appelé <a href="http://www.redistributions.eu/2013/07/fatca-bombe-atomique-americaine-et.html" target="_blank">Fatca</a> sur la tempe, il est vrai). Bientôt, il échangera automatiquement des informations avec les pays tiers sur une large gamme de revenus financiers. Il espérait ainsi, enfin, se débarrasser de cette mauvaise réputation de paradis fiscal. Et voilà que les LuxLeaks lui pourrissent cette opération place propre!<br />
Voilà son Premier ministre obligé de convoquer dare-dare une conférence de presse pour clamer que "<i>les rulings sont conformes avec les lois internationales</i>". Voici son ministre des Finances réunissant lui aussi les journalistes à Bruxelles, pour leur tenir des propos jamais entendus dans le bouche d'un financier grand-ducal.
"<i>Ce qui est légal aujourd'hui n'est peut-être plus souhaitable</i>",
a reconnu Pierre
Gramegna, car
"<i>une situation où des entreprises internationales ne paient pas ou peu
d'impôt est intenable, incompréhensible pour les (autres)
contribuables</i>".<br />
Les LuxLeaks marquent donc une nouvelle étape dans la mise à mal d'un système, construit depuis quarante ans, qui a permis aux multinationales et aux familles fortunées d'éviter l'impôt. Comme les <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Offshore_Leaks" target="_blank">Offshore Leaks</a>, comme les affaires <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Affaire_Cahuzac" target="_blank">Cahuzac</a>,<a href="http://www.liberation.fr/economie/2013/06/07/evasion-fiscale-la-suisse-ubs-mise-en-examen_909076" target="_blank">UBS</a>, <a href="http://www.lemonde.fr/economie/article/2014/06/10/affaire-hsbc-les-dessous-d-une-gigantesque-fraude-fiscale_4435297_3234.html" target="_blank">HSBC</a>, ces Luxembourg Leaks attisent la colère d'une population lassée de voir se soustraire à la solidarité ceux qui devraient au contraire y participer le plus. Cette indignation est indispensable: les lecteurs de ce blog auront compris que sans elle, les réformes de justice fiscale s'enlisent dans des comités techniques, où les mauvaises habitudes reprennent vite le dessus (voir notamment <a href="http://www.redistributions.eu/2014/03/quand-berlin-et-londres-sallient-pour.html" target="_blank">ceci</a>).<br />
<br />
Quelques éléments de réflexion face aux arguments avancés par le Luxembourg pour sa défense:<br />
- "<b>la plupart des pays européens pratiquent le ruling</b>": c'est vrai, et il n'y a rien de mal au fond à ce que des entreprises obtiennent une clarté légale rapide sur leur situation fiscale. Le problème, c'est le caractère négocié et secret de ces décisions anticipés. J'ai consacré quelques pages de mon <a href="http://www.redistributions.eu/2014/04/dumping-fiscal-enquete-sur-un-chantage.html" target="_blank">livre sur le dumping fiscal</a> à cette pratique. La présidente du service belge de ruling, Véronique Tai, y confesse l'existence d'une marge de négociation assez large entre le contribuable et l'administration sur les prix de transferts. Le Service des décisions anticipées (SDA) prend en considération des enjeux de concurrence fiscale dans ce contexte, dit-elle. Autrement dit: la crainte de voir une entreprise partir vers de meilleurs cieux fait partie de la négociation. Difficile d'imaginer que des cadeaux fiscaux ne sont pas octroyés aux entreprises. <br />
- <b>"Tout est légal</b>". C'est forcément vrai au final puisqu'une administration a apposé le cachet de la légalité sur le montage proposé. Mais auparavant, les cabinets d'audit et conseillers fiscaux des multinationales auront eu l'occasion de tester des schémas plus ou moins agressifs. Une commission d'enquête britannique a permis de <a href="http://www.taxjustice.net/2014/11/06/pwc-luxembourg-wasnt-legal-behaviour/" target="_blank">mettre en évidence</a> que des montages fiscaux complexes n'ayant que 25% de chances d'être légaux étaient proposés. <br />
- "<b>Le Luxembourg va coopérer pleinement avec les <a href="http://www.redistributions.eu/2014/10/cadeaux-fiscaux-apple-le-ver-est-dans.html" target="_blank">enquêtes</a> de la Commission européenne</b>". Ce n'est que très partiellement vrai. Le Grand-Duché refuse toujours de transmettre aux services de la concurrence des documents qui doivent permettre d'évaluer si des aides d'Etat illégales ont été accordées via des rulings. Soucieux de garantir la discrétion à ses chers contribuables, notamment Amazon, le Luxembourg ne veut transmettre que certaines décisions spécifiques, mais pas tout le dossier. Est-il totalement insensé d'imaginer qu'il cherche à ménager le géant de la vente en ligne, qui <a href="http://paperjam.lu/news/amazon-un-troisieme-site-et-un-millier-de-postes" target="_blank">fait travailler près de 1.000 personnes sur plusieurs sites luxembourgeois</a> ? <br />
Cette obstruction amène une autre question. Les rulings fuités par le consortium ICIJ pourront-ils être utilisés par la Commission européenne, voire par le fisc d'autres pays ? Ce n'est pas certain. La Commission elle-même est hésitante. Le Luxembourg qualifie quant à lui d'illégaux les documents publiés.<br />
<br />
Soulignons un dernier point à propos des LuxLeaks: ils posent évidemment la question de la responsabilité de Jean-Claude Juncker. Premier ministre et ministre des Finances du Grand-Duché pendant près de 20 ans, il porte une grande responsabilité dans la conception du modèle fiscal Luxembourgeois, qualifié par le Tax Justice Network d'"<a href="http://www.google.be/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=3&cad=rja&uact=8&ved=0CC8QFjAC&url=http%3A%2F%2Fwww.financialsecrecyindex.com%2FPDF%2FLuxembourg.pdf&ei=yaNfVNyQFYXWauG5gZAO&usg=AFQjCNEBOrfoXX23wahzs6Xzer9rZ1Gcig&sig2=H-x4_Mr9g9atcpUZvJ7KPw" target="_blank">étoile noire</a>" des paradis fiscaux en Europe. Comme je le soulignais dans un <a href="http://www.redistributions.eu/2014/07/entre-social-et-paradis-fiscal-ou.html" target="_blank">portrait</a> réalisé à l'occasion de son accession à la présidence de la Commission européenne, l'homme ne s'est jamais expliqué. Dans les nombreux débats parlementaires, conférences de presse, émissions télévisées où des questions lui ont été posées, il a toujours botté en touche avec un art consommé de la noyade de poisson. Il est temps qu'il s'explique enfin. Ce n'est pourtant pas la voie qu'il semble suivre après les LuxLeaks. Celui qui avait annoncé une Commission européenne très politique a préféré envoyer son porte-parole au casse-pipe devant une meute de journalistes européens déchaînés. Il a pour sa part annulé une apparition publique à Bruxelles, lui préférant un événement plus discret en ses terres natales...Unknownnoreply@blogger.com2tag:blogger.com,1999:blog-3619764298792448838.post-75931858077605478002014-10-27T11:12:00.000+01:002014-10-27T11:12:14.404+01:00Qui mettra fin à la guerre fiscale entre Européens ?"Qui mettra fin à la guerre fiscale entre Européens ?" C'est le titre d'un long article que publie Basta au sujet de mon livre <a href="http://www.redistributions.eu/2014/04/dumping-fiscal-enquete-sur-un-chantage.html" target="_blank">Dumping fiscal</a>.<br />
<blockquote class="tr_bq">
<i>C’est une « Europe de l’optimisation fiscale » que nous décrit Éric Walravens, auteur d’une enquête sur un chantage qui ruine nos États.
Du « double Irish » au « sandwich hollandais » en passant par les
« intérêts notionnels » belges, le « Crédit impôt recherche » français
ou les « rulings » fiscaux, ces accords secrets entre le fisc d’un État
et une multinationale, Éric Walravens propose un tour d’horizon des
dispositifs « attractifs » offerts par les pays européens aux grandes
firmes : une véritable jungle de dérogations et de régimes d’exception,
où le droit commun fiscal ne semble plus valoir que pour les « petits ».
Un dumping fiscal qui mine l’Europe alors qu’une harmonisation se fait
attendre depuis 30 ans. </i></blockquote>
L'interview est accessible <a href="http://www.bastamag.net/Qui-mettra-fin-a-la-guerre-fiscale" target="_blank">ici</a>.<br />
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<br />Unknownnoreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3619764298792448838.post-35028793529763584252014-10-07T15:00:00.001+02:002014-10-13T09:03:08.878+02:00Pour les apparences ou pour la transparence, PwC se range au "country by country reporting".Obliger les banques à publier, pour chaque pays d'activité, leur chiffre d'affaires et le montant des impôts payés ne risque pas d'affecter l'économie. Il ne faut pas être grand clerc pour le comprendre, mais c'est la conclusion à laquelle est parvenue le cabinet d'audit PwC, que la Commission européenne avait chargé d'enquêter sur le sujet (<a href="http://www.euractiv.com/sections/euro-finance/publishing-banks-taxes-and-turnover-will-help-economy-says-pwc-308902" target="_blank">ici</a>). La Commission elle-même est tenue de rendre ses conclusions sur le "country-by-country reporting"(CBCR) pour les banques, en vertu d'une directive récente.<br />
J'avais relaté sur ce blog (<a href="http://ndonne.blogspot.be/2014/07/transparence-fiscale-des-entreprises.html" target="_blank">ici</a>) les critiques formulées à l'encontre de cette mission confiée à un cabinet d'audit lui-même très impliqué dans les pratiques d'optimisation fiscale. PwC avait en outre déjà formulé des arguments <i>contre</i> le CBCR au nom de 14 multinationales peu désireuses de voir se renforcer la transparence sur leurs contributions fiscales. Le conflit d'intérêt était évident.<br />
Ces critiques, émises par des parlementaires et des ONG, ont-elles été entendues ? Je note en tout cas la visite récente de plusieurs employés de PwC sur mon profil Linkedin, et j'en déduis que les remarques ne sont pas passé inaperçues... Les grands cabinets d'audit apprécient peu d'être pointés du doigt.<br />
Hasard du calendrier ou stratégie concertée, le Financial Times rapporte ce mardi des propos bien comme il faut du patron de la branche internationale de PwC, Dennis Nally. Interrogé sur la dimension morale de son activité de conseil fiscal, M. Nally confirme qu'elle doit être gardée à l'esprit. "<i>Ce n'est pas seulement ce que les entreprises peuvent faire, c'est ce qu'elles devraient faire</i>", note-t-il. "<i>Les firmes de services professionnels ont un rôle à jouer pour aider les entreprises à réfléchir à ce qui est acceptable et approprié</i>". On prend note.<br />
Qu'il s'agisse de faire démentir les critiques ou de conclusions véritables, PwC ne semble en tout cas trouver que des avantages au CBCR, dans son rapport sur la transparence bancaire. Le rapportage par pays donnera une meilleure image de la situation des banques, facilitera la tâche des régulateurs et pourrait même amener les investisseurs vers des banques plus transparentes. C'est à ce demander pourquoi ce point a suscité tellement de résistances... Puisque celles-ci appartiennent désormais au passé, gageons que le CBCR sera étendu rapidement à tous les secteurs de l'économie.<br />
<br />
<b>UPDATE</b><br />
Le tax Justice Network vient de publier un <a href="http://www.taxjustice.net/2014/10/08/country-country-reporting-news-finland-netherlands-france/" target="_blank">article de blog</a> intéressant, qui fait le point sur les dernières évolutions du CBCR en Europe.<br />
Il montre notamment à quoi ressemble ce rapportage pays par pays, que la France a commencé à imposer cette année (pour le chiffre d'affaire et le nombre d'employés; les impôts, subventions et bénéfices suivront en 2015). Plusieurs liens vers les rapports CBC des banques françaises sont mis à disposition, notamment <a href="http://media-cms.bnpparibas.com/file/83/0/ddr_2013_bnp_paribas.31830.pdf" target="_blank">celui de BNP Paribas</a> (p. 442). Ces données limitées donnent déjà <br />
un éclairage intéressant. On savait que la banque française, dont l'Etat belge est actionnaire de référence, est active dans les paradis fiscaux. Le rapport montre qu'elle y emploie dans certains cas pas mal de personnel (222 ETP à Jersey, 214 à Monaco), et dans d'autres pas du tout (zéro aux îles Caïmans, malgré une activité financière réelle). Unknownnoreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3619764298792448838.post-2381942471536920872014-10-05T17:16:00.002+02:002014-10-16T20:36:23.545+02:00Cadeaux fiscaux à Apple: le ver est dans la pomme<br />
<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjdM2m5ji_Bz_auQjYe-k8v6Awy746eRZ9BL-0DNnYV74KRAvrjTgbqz2jaKbCj7iZ9etls-KwGs5V3_oLgFWMnevvSFfZAU5ZCEaGJTHb251AFAKkuPGAHN69A1QSLk3wHGli1FD4jA6GW/s1600/ver.jpeg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjdM2m5ji_Bz_auQjYe-k8v6Awy746eRZ9BL-0DNnYV74KRAvrjTgbqz2jaKbCj7iZ9etls-KwGs5V3_oLgFWMnevvSFfZAU5ZCEaGJTHb251AFAKkuPGAHN69A1QSLk3wHGli1FD4jA6GW/s1600/ver.jpeg" /></a></div>
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Apple pourrait devoir rembourser à Irlande des millions d'euros d'avantages fiscaux indûs (les fameux "sweetheart deals"). C'est sans doute ce que vous aurez retenu des articles de presse qui ont évoqué cette semaine la procédure initiée par la Commission européenne contre Dublin (voir le <a href="http://www.theguardian.com/technology/2014/sep/30/apple-repay-millions-irish-government-tax-deal" target="_blank">Guardian</a> ou le <a href="http://www.lemonde.fr/economie/article/2014/09/29/apple-dans-le-viseur-de-la-commission-europeenne_4495888_3234.html" target="_blank">Monde</a>) . Depuis quelques mois, les informations du genre se succèdent, comme autant de signes que l'optimisation fiscale agressive pratiquée par les grandes entreprises n'est plus aussi tolérée qu'elle l'était. Une bonne nouvelle, sans doute, pour tous ceux qui voudraient que les multinationales contribuent à leur juste mesure à la collectivité. Dans le cas d'Apple, qui a <a href="http://www.forbes.com/sites/robertwood/2014/06/06/apple-offshore-tax-gimmicks-like-rest-of-fortune-500-would-send-individuals-to-jail/" target="_blank">planqué</a> plus de 100 milliards de dollars offshore, un tel souhait est difficilement contestable. <br />
Mais de quoi est-il question exactement ? Voyons ce que fait la Commission européenne - et surtout ce qu'elle ne fait pas. En fait, "Bruxelles" a décidé d'utiliser sa meilleure arme: la politique de concurrence. En la matière, elle jouit de compétences élargies, qu'elle ne se prive pas d'utiliser. Sans coup férir, elle sanctionne les cartels, interdit des fusions et impose le remboursement d'aides d'Etat. Tout le contraire de la compétence fiscale, qui reste la chasse gardée des Etats (c'est en vain que la Commission plaide, depuis les années 1960, pour une harmonisation de l'impôt des sociétés).<br />
Dans le cas d'Apple, elle ne cible pas tant le faible taux d'impôt <i>en tant que tel</i>. Elle vise plutôt le caractère <i>sélectif</i> de ce cadeau fiscal, qui risque de conférer à Apple un avantage sur ses concurrents. Ce biais lui donne une base légale pour agir.<br />
Ce n'est pas la première fois que la Commission se base sur la politique de concurrence pour faire avancer des dossiers fiscaux. A la fin des années 1990, déjà, sous l'impulsion de Mario Monti, elle avait lancé des procédures contre des régimes jugés déloyaux, comme les centres de coordination belges. Après des années de bataille juridique, elle a fini par obtenir gain de cause, et les régimes ont été abolis. Une victoire à la Pyrrhus, qui n'a pas empêché les multinationales de trouver de multiples autres voies pour réduire à néant leur facture fiscale.<br />
Le nouveau front ouvert par l'actuel commissaire à la concurrence, Joaquin Almunia -et auquel <a href="http://www.euractiv.com/sections/eu-priorities-2020/vestager-dodges-meps-questions-google-probe-irish-tax-loophole-308905" target="_blank">promet</a> de combattre Margrethe Vestager qui lui succédera en novembre- est-il voué au même sort ? C'est possible. La bataille n'en est pas pour autant insignifiante.<br />
Son enjeu, au fond, n'est pas Apple, ni même l'Irlande, c'est la pratique du ruling, qui s'est généralisée depuis les années 1980. Initiée aux Pays-Bas, et rapidement copiée par les autres pays, elle consiste à donner aux entreprises une clarté précoce sur la légalité de leurs montages fiscaux. En Belgique, on parle de "décisions anticipées", en France de "rescrits". Ces décisions sont aujourd'hui un must pour les multinationales et leurs conseillers fiscaux. Ceux-ci ne viennent pas seulement obtenir un éclairage légal. Dans une confortable discrétion, ils peuvent en fait négocier l'impôt payé. Dans quelle mesure ? Difficile de se faire une idée, tant l'opacité règne. <br />
La procédure lancée par la Commission contre l'Irlande confirme clairement le caractère négocié des rulings. C'est même celui-ci qui est constitutif de l'avantage sélectif octroyé à Apple - et donc de l'infraction.<br />
"<i>La base taxable a été négociée, plutôt qu'étayée en référence à des transactions comparables</i>", comme le prévoient les règles sur les <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Prix_de_transfert" target="_blank">prix de transfert</a>, argumente la Commission. Un certain nombre de transactions ont été conçues spécialement pour atteindre un résultat taxable limité. La <a href="http://ec.europa.eu/competition/elojade/isef/case_details.cfm?proc_code=3_SA_38373" target="_blank">décision</a>, accessible sur internet, mérite d'être lue. <br />
On en parle moins, mais l'Europe n'a pas ciblé qu'Apple et l'Irlande. Une autre procédure vise un ruling luxembourgeois en faveur d'une filiale financière de Fiat. (C'est une loi médiatique tacite des années 2010: tout ce qui concerne Apple grimpe automatiquement quelques échelons dans la hiérarchie de l'info.) La Fiat Punto est indéniablement moins sexy que l'iPhone, mais la décision visant Fiat Finance and Trade (FFT) mérite elle aussi qu'on s'y attarde.<br />
Tout d'abord pour noter que la Commission n'est même pas certaine d'avoir identifié la bonne société! Le Luxembourg est tellement secret qu'il refuse toujours de transmettre ce genre d'informations basiques. Qu'à cela ne tienne, les services de Joaquin Almunia ont bien mené leur petite enquête. Au terme d'une analyse solide (<a href="http://ec.europa.eu/competition/elojade/isef/case_details.cfm?proc_code=3_SA_38375" target="_blank">ici</a>, en français), en dépit du manque de données, ils parviennent à montrer que l'assiette fiscale a été calculée de manière extrêmement favorable. FFT ne paie d'impôt que sur une fraction infîme de son bénéfice...<br />
Ces procédures européennes sont bienvenues, mais elles ne devraient pas détourner l'attention du véritable enjeu fiscal européen: celui d'une assiette commune pour l'impôt des sociétés. Tant que les Etats n'auront pas harmonisé la base de calcul de l'impôt, toutes les manipulations resteront possibles. Le débat public sur l'impôt se concentre sur les taux, mais c'est l'assiette qui est déterminante. Un signe ne trompe pas: en Belgique, les multinationales ont fait savoir qu'elles préféraient conserver le régime des intérêts notionnels (qui leur permet de réduire drastiquement leur assiette) à une réduction par deux du taux !<br />
Plutôt que d'investir son énergie dans une nouvelle victoire à la Pyrrhus, la nouvelle Commission serait bien inspirée de donner un nouvel élan à son projet d'<a href="http://www.touteleurope.eu/les-politiques-europeennes/fiscalite/synthese/le-projet-dassiette-commune-consolidee-de-limpot-sur-les-societes-accis.html" target="_blank">ACCIS</a>. Un tel effort requerra du courage politique, tant les opposants sont nombreux. Pierre Moscovici, nouveau commissaire à l'économie et à la fiscalité, sera-t-il à la hauteur de cet enjeu ? Les médias européens dissertent aujourd'hui sans fin sur sa gestion plus ou moins flexible des déficits. Mais c'est aussi sur le terrain de l'harmonisation fiscale qu'il pourra - ou non - imprimer sa marque. Unknownnoreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3619764298792448838.post-87695541971830870482014-10-03T12:50:00.002+02:002014-10-03T12:50:34.087+02:00Nouvelle Donne change de nomCe blog s'intitulera désormais "Redistributions", afin d'éviter toute confusion avec le parti Nouvelle Donne.Unknownnoreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3619764298792448838.post-21341265216701302702014-09-16T12:52:00.000+02:002014-09-16T13:12:39.109+02:00"Bancocratie": la radicalité nécessaire d'Eric ToussaintEric Toussaint m'a demandé d'introduire la présentation de son dernier livre, "<a href="http://cadtm.org/Bancocratie" target="_blank">Bancocratie</a>", ce mardi soir, à la librarie Livre aux trésors à Liège. Si vous êtes dans le coin, venez écouter et débattre du rôle des banques dans la société. C'est peut-être moins relaxant que de rester chez soi devant une série, mais ça ne sera pas ennuyeux pour un sou: sous la plume de mon homonyme par le prénom, le secteur bancaire se met carrément à ressembler à "Breaking Bad"!<br />
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<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh_cDyzZzfiSF92Dd25dA3NfcYRXGeoxgutA4ZBYB58QN-qJvvfDRGp2wbmx8UJGrB_bvxpCfTDX1cj-xv3mGsHM645L3AAskFTDHPY7I03KNwh5vqBZmjxHrdxzsFOmZDDGh5miY5ITHbO/s1600/bancocratie.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh_cDyzZzfiSF92Dd25dA3NfcYRXGeoxgutA4ZBYB58QN-qJvvfDRGp2wbmx8UJGrB_bvxpCfTDX1cj-xv3mGsHM645L3AAskFTDHPY7I03KNwh5vqBZmjxHrdxzsFOmZDDGh5miY5ITHbO/s1600/bancocratie.jpg" height="320" width="226" /></a></div>
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La première fois que j'ai parlé à Eric Toussaint, c'était en 2011 au plus fort de la crise des dettes souveraines. Je me souviens distinctement de cette période où l'Europe était à la croisée des chemins, pour ne pas dire au bord de l'abyme. Alors que les ministres des Finances et banquiers centraux s'affairaient à éviter à tout prix un défaut de paiement de la Grèce et d'autres pays fragilisés, Eric Toussaint plaidait, lui, pour l'annulation d'une partie des dettes publiques européennes (comme il l'expliquait dans cette <a href="http://www.lalibre.be/economie/actualite/les-mesures-d-austerite-sont-une-supercherie-51b8dcffe4b0de6db9c3bdc9" target="_blank">interview</a> à La Libre Belgique). Il y avait là un changement de paradigme frappant: Eric Toussaint était (il l'est toujours) le président du CADTM, le Comité pour l'annulation des dettes du <i>tiers monde</i>. Autant dire que pour un journaliste couvrant la politique européenne, rompu à la <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Loi_de_proximit%C3%A9" target="_blank">loi du mort-kilométrique</a>, son sujet de base était loin de mon radar. Or voilà qu'il s'avérait que les dettes des pays européens, aussi, devaient être annulées ? L'Europe était-elle en voie de tiers-mondisation, comme le laissaient supposer les <a href="http://euobserver.com/social/113841" target="_blank">articles</a> effarants sur les opérations de MSF en Grèce ? <br />
Je connaissais le concept de <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Dette_odieuse" target="_blank">dette odieuse</a> des dictateurs africains, dont le droit international prévoit l'annulation. Eric Toussaint en proposait une version beaucoup plus étendue: les dettes contractées pour éponger les pertes des banques devaient elles aussi être remises à zéro, plaidait-il - et n'a-t-il cessé de plaider depuis lors, d'Athènes à Bruxelles. <br />
Mais en plein coeur de la crise, cette demande a été balayée par un argument massue: le risque de contagion. En Belgique, Didier Reynders, alors ministre des Finances, que j'ai interrogé à maintes reprises sur le sujet, répétait comme un mantra qu'un défaut de paiement de la Grèce serait similaire à la faillite de Lehman Brothers. La déroute du géant bancaire américain avait plongé le système financier mondial dans le choas trois ans plus tôt. ""Même un âne ne bute pas deux fois sur la même pierre", insistait Didier Reynders en 2011. La suite de l'histoire est connue: les créanciers privés de la Grèce ont accepté du bout des lèvres une décote sur leurs titres, mais l'essentiel de la dette grecque est passée désormais entre les mains des autres Etats européens, à travers le Mécanisme européen de stabilité, au prix d'une cure d'austérité drastique.<br />
Dans son livre "Bancocratie", qui vient de paraître aux éditions Aden, Eric Toussaint règle son compte au fameux risque de contagion.<br />
<blockquote class="tr_bq">
"<i>Aucune des faillites bancaires depuis 2007", </i>rappelle-t-il<i>, "n'a été provoquée par un tel défaut de paiement. Aucun des sauvetages bancaires organisés par les Etats n'a été rendu nécessaire par une suspension de paiement de la part d'un Etat surendetté. Ce qui menace les banques, c'est le montage de dettes privées qu'elles ont progressivement construit depuis la grande déréglementation qui a commencé à la fin des années 1970 et qui s'est poursuivie au cours des années 1990 jusqu'à 2007-2008</i>".</blockquote>
Ce n'est pas le moindre mérite du livre que d'analyser méthodiquement le bilan des banques européennes pour montrer à quel point les risques encourus par le système financier est le fait des banques elles-mêmes.<br />
Dans les chapitres les plus intéressants, à la fois techniques et pédagogiques, l'auteur explique pourquoi et comment les banques ont gorgé leurs comptes de produits dérivés risqués, axés sur le profit, au détriment des prêts aux ménages et aux entreprises. Si le constat n'est pas neuf, Bancocratie donnera à ses lecteurs les outils pour mieux décoder les informations cryptiques que seule véhicule la presse financière.<br />
Le chapitre relatif aux règles de Bâle permet de comprendre à quel point les nouvelles exigences de recapitalisation des banques sont manipulables.<br />
Spéculation sur les produits agricoles, recherche de retours élevés, banques universelles "<i>too big too fail & jail</i>": toutes les grandes dérives bancaires sont dénoncées avec une rage qui n'ôte rien au sérieux de l'exercice. <br />
Qu'on partage ou non toutes les conclusions d'Eric Toussaint, son livre dresse un constat radical, mais nécessaire. Car ce n'est qu'en prenant la mesure des enjeux que le politique sera en mesure d'y apporter des remèdes. <br />
Parmi les nombreuses pistes que l'auteur offre dans son dernier chapitre, relevons la plus emblématique: la "socialisation du secteur bancaire sous contrôle citoyen". Est-elle réellement utopique, au vu du coût des sauvetages bancaires par les contribuables ? La question doit être posée.<br />
L'Etat belge contrôle Belfius à 100%, il est le premier actionnaire de BNP Paribas, mais l'actualité de l'année écoulée a révélé à quel point il se désintéressait de sa mission d'actionnaire public. Comble du pathétique: l'un des administreurs représentant l'Etat belge au Conseil de BNPP, Emiel Van Broekhove, s'est gargarisé publiquement de son indépendance. Dans une interview, il a osé affirmer qu'il n'avait pas de compte à rendre<i>. </i><br />
Ces propos ont suscité l'indignation dans la classe politique, mais il n'est pas certain que le gouvernement ait pris la mesure de l'enjeu.<br />
Voici d'ailleurs - en exclusivité - ce que dit le projet d'accord de la coalition suédoise à ce sujet: <br />
<blockquote class="tr_bq">
"<i>Le gouvernement fédéral continuera à jouer son rôle d'actionnaire dans des institutions financières en conformité avec les principes de gouvernance en vigueur et se basera à cet égard sur le Code de conduite de l'OCDE de gouvernement d'entreprise à l'intention des Etats qui détiennent une participation dans ces entreprises. Le gouvernement établit un cadre pour les administrateurs qui, en fait, représentent l'Etat et conclut des accords avec ladirection de ces entreprises afin de s'assurer queles normes d'éthique des affaires soient respectées</i>".</blockquote>
A coup sûr, Eric Toussaint trouverait ça mou du genou, d'autant que le prochain gouvernement entend se désengager du secteur bancaire.<br />
<blockquote class="tr_bq">
"<i>Le gouvernement veille à valoriser les participations dans le
secteur financier au moment opportun et de manière judicieuse. Le rôle
de la Société Fédérale de Participations et d'lnvestissement est
réexaminé : la capacité de gestion est renforcée, la politique
d'investissement est réorientée et les participations de l'Etat fédéral sant centralisées au sein de la SFPI</i>".</blockquote>
<br />Unknownnoreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3619764298792448838.post-32099614687586096182014-09-15T09:51:00.004+02:002014-09-15T09:53:35.883+02:00Tax transparency: when PwC has a finger in every pie<style type="text/css">P { margin-bottom: 0.08in; direction: ltr; widows: 2; orphans: 2; }P.western { font-size: 12pt; }P.cjk { font-size: 12pt; }P.ctl { font-size: 12pt; }A:link { color: rgb(0, 0, 255); }</style>
<br />
<div class="western" lang="en-GB" style="margin-bottom: 0in;">
Do you know CBCR? The acronym hides a new public tool aimed at ensuring that multinational corporations reveal how much tax they pay in every country they work in. It's no little matter: while we all know that big business manages to shrink corporate tax bills to around 10% or less, very little information is available on the amounts paid to each and every country. Understandable as it is that taxpayers’ personal information should remain confidential, the current level of opacity can no longer be warranted. Multinational companies play an important role in the lives of globalized workers/consumers. Knowing how much tax they pay, and where, should be as natural as being informed about government expenditure. Hence the interest of CBCR, the so-called country by country reporting. This new standard will soon oblige companies to divulge, for every country where they do business, taxes paid and subsidies received. Back in 2003, it was initially proposed by a British accountant named Richard Murphy, a close ally of the tax justice movement, and has since come a long way. It has now emerged from the small activists circles and is on the verge of becoming an internationally acknowledged norm - to the delight of its instigator (see <a href="http://www.taxresearch.org.uk/Blog/2013/02/28/we-got-it-country-by-country-reporting-is-on-its-way-for-banks/" target="_blank">here</a>).</div>
The EU and USA have already enforced it for extractive industries. Since these dig and pump in the core of countries, including numerous developing states, it’s only natural that their citizens should know how much they get in return in the form of tax, so goes the logic. From 2016 or 2017 onwards, mining and logging companies will have to start to publish CBC reports.<br />
But why stop there? Couldn’t CBCR be imposed on all multinational corporations? EU heads of state and government seemed to think so in May 2013, when they issued a call for such transparency after a summit dedicated to tax avoidance. Unfortunately, as I have reported on this <a href="http://ndonne.blogspot.be/2014/03/quand-berlin-et-londres-sallient-pour.html" target="_blank">blog</a>, the file has been discretely shelved, courtesy of German and British lobbying.<br />
Another sector, however, has been deemed ripe for CBCR: the banking sector.<br />
A recent EU directive on capital requirements obliges banks to publish a certain amount of information country by country (taxes, but also turnover, number of employees, etc.). In the current climate of hostility towards financial industries, lobbyists have only succeeded in ensuring that this new requirement is evaluated (and possibly amended) by the European Commission.<br />
Harmless? Pay attention to the small print. The Commission has just decided that it won’t carry out the evaluation itself, but rather contract the audit firm PriceWaterhouseCoopers. The reason for this is that it lacks the staff to conduct the investigation itself. The one person in charge of corporate reporting just cannot measure the impact on the entire financial sector by himself. But there is a trick: PwC is far - very far indeed – from offering the independence one might expect on the topic. The firm is itself very actively promoting aggressive tax avoidance (as I have documented in chapter 7 of my <a href="http://ndonne.blogspot.be/2014/04/dumping-fiscal-enquete-sur-un-chantage.html" target="_blank">book</a>) In Belgium, the local branch supports the Tax Freedom Day, an anti-tax lobbying tool designed by a right-wing think tank in the United States. Interestingly, PwC has lobbied against the very CBCR it has been mandated to evaluate. On behalf of 14 multinational companies, the audit firm has pushed the OECD to limit the transparency of its own CBCR standard. The information, so PwC has argued, should be exchanged only between tax administrations, and not disclosed to the public (see <a href="http://www.oecd.org/ctp/transfer-pricing/volume3.pdf" target="_blank">here</a>, page 147 onwards). In other words, PwC is being asked to give its opinions on a measure it has lobbied against on behalf of its clients. The conflict of interest couldn’t be clearer.<br />
But how can this be surprising? For years now, big audit firms have managed to find a cozy spot in the middle of the international fiscal debate, on the one hand advising governments on designing taxes, and on the other helping companies to avoid them.<br />
Just recently, the Australian presidency of the G20 accepted sponsorship totalling at least 300.000 US dollars from three global accounting firms in exchange for seats at a high-powered G20 summit on countering corporate tax dodging.<br />
While just another example among many other cases of role confusion, it illustrates how audit firms succeed in capturing the attention of world leaders. Again, it’s no little matter, when you know how little they like the global clampdown on tax avoidance carried out by the G20 and the OECD since the financial crisis (see <a href="http://www.lefigaro.fr/impots/2014/06/04/05003-20140604ARTFIG00312-les-multinationales-redoutent-la-fin-de-l-optimisation-fiscale.php" target="_blank">here</a>).Unknownnoreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3619764298792448838.post-48976760678120795152014-09-15T09:46:00.000+02:002014-09-15T09:46:36.202+02:00"Dumping fiscal" in EnglishA chapter of my book, which has earned critical <a href="http://ndonne.blogspot.be/2014/04/dumping-fiscal-enquete-sur-un-chantage.html" target="_blank">acclaim</a> in the French and Belgian media, has been translated in English.<br />
Here it goes:<br />
<blockquote class="tr_bq">
<i>“It is your duty to negotiate from a position of strength in tomorrow’s world.” Thus speaks Ajit Shetty, the head of the Forum for Multinational Companies in Belgium. The month is June 2013, and the MCB Forum is holding its annual meeting in a chic hotel in the capital. Baron Shetty knows what he is speaking of: for a long time he directed Janssen Pharmaceutica, a big fish in the pharmaceutical sector, one of the 250 subsidiaries of the global behemoth Johnson & Johnson. <br /><br />The incentives offered by Belgium are “very attractive,” he says. Besides notional interest deduction – a system of massive tax reduction - the legislator has devised a specific deduction for patents. “We have the best of both worlds,” the businessman exclaims. But now is not the time to lower one’s guard. In the full swing of the economic crisis, fiscal gifts are no longer the order of the day. “We are not asking for new enticements,” but Belgium must “guarantee stability for the next ten years,” he demands. He warns the executives who have come to hear him not to procrastinate. If the fiscal climate is downscaled, “you might as well pack your bags and leave the country in a few months’ time.” Doesn’t the European financial transaction tax risk weighing on earnings? “If you can relocate to Geneva and avoid this tax, why not?” </i><br />
<i><br /></i>
(click <a href="https://drive.google.com/file/d/0B-8Biv_CX1ocblotRlM4NGs5ZDA/edit?usp=sharing" target="_blank">here</a> to read the entire chapter)</blockquote>
A recent blog post has also been translated and will be published here. Unknownnoreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3619764298792448838.post-55611497170104053932014-08-05T15:00:00.003+02:002014-08-05T15:00:44.366+02:00La libération fiscale, vaste fumisterieEn ces temps troublés où l'on commémore des passés qui semblent ressembler à nos avenirs, il est une confusion sémantique dont les médias sont particulièrement friands. J'ai nommé la journée de libération fiscale, célébrée partout dans le monde comme le "le jour où le travailleur moyen cesse de travailler pour l’État et commence à travailler pour lui-même".<br />
En Belgique, la Libération, c'est pour demain le 6 août, ont fait savoir des instituts néolibéraux et cabinets d'audit, repris à l'unisson par les médias (voir notamment <a href="http://www.lesoir.be/616967/article/economie/2014-08-05/belgique-derniere-atteindre-son-jour-liberation-fiscale" target="_blank">Le Soir</a>). Ceux qui ont vécu celle de l’été 1944 apprécieront le mélange des genres. <br />
Il n'est pas inutile de rappeler que la journée de libération fiscale est un concept véhiculé à l'origine par la droite ultra-libérale américaine, sous le nom de Tax Freedom Day. Il se dit que l'économiste <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Milton_Friedman" target="_blank">Milton Friedman</a>, grand pourfendeur de l'Etat et des politiques keynésiennes, voulait en faire la jour de la fête nationale (<a href="http://www.cato.org/blog/milton-friedman-tax-freedom-day" target="_blank">ici</a>)!<br />
Nul ne pourrait douter que le travail est trop taxé en Europe, et singulièrement en Belgique, où les travailleurs sont tout simplement les plus imposés au monde. Baisser cette fiscalité en la compensant par des taxes environnementales ou sur le capital s'impose comme une évidence.<br />
Il n'en reste pas moins que la journée de libération fiscale est une idée fumeuse. Dans cette conception pour le moins étroite, l’État est un corps étranger qui ponctionne ses citoyens, tandis que les notions de redistribution et de service public n’existent tout simplement pas. On travaillerait pour soi une partie de l'année et pour un monstre assoiffé d'impôts le reste du temps. On oublie que les services publics fonctionnent toute l'année, et que les impôts servent aussi à atténuer les inégalités qui se sont tant creusées ces dernières décennies. On oublie de signaler que les pays qui sont "libérés" le plus tard sont aussi souvent ceux qui sont les mieux classés dans l'indice de développement humain de l'ONU.<br />
J'ai déjà écrit ceci dans un <a href="http://ndonne.blogspot.be/2014/04/dumping-fiscal-enquete-sur-un-chantage.html" target="_blank">livre</a> consacré à la concurrence fiscale en Europe. A ce titre, j'ai été invité à débattre de la journée de libération fiscale avec Cécile Philippe de l'institut Molinari (en podcast <a href="http://www.bfmtv.com/grille/bfmbusiness/podcast-radio/29565/" target="_blank">ici</a>, à partir de 25'00).Unknownnoreply@blogger.com4tag:blogger.com,1999:blog-3619764298792448838.post-14815980703841723992014-07-16T19:51:00.004+02:002014-07-17T11:36:41.942+02:00Entre social et paradis fiscal, de quel côté penche vraiment Jean-Claude Juncker ?Quand, à la tête de l'Eurogroupe, il mettait en musique le programme d'austérité infligé à la Grèce, Jean-Claude Juncker ne manquait pas un occasion de souligner à quel point son coeur saignait de voir le peuple grec subir tant de souffrances. Mais la rédemption était nécessaire, expliquait celui qui incarnait alors la responsabilité politique à l'oeuvre derrière la troïka.<br />
L'homme aime à se présenter comme un social-chrétien à l'ancienne, aussi soucieux de solidarité que de gestion rigoureuse des comptes publics. Cette image, soigneusement cultivée, lui vaut d'être apprécié à gauche par ceux qui voient en lui un conservateur modéré. <a href="https://www.facebook.com/philippe.lamberts.3" target="_blank">Philippe Lamberts</a> (Ecolo) pouvait ainsi dire de lui récemment qu'il a "une vraie conscience sociale<span class="userContent" data-ft="{"tn":"K"}"><span class="text_exposed_show">" (<a href="http://www.rtbf.be/info/monde/detail_jean-claude-juncker-un-des-rares-qui-a-encore-une-conscience-sociale?id=8316207" target="_blank">ici</a>). Ce crédit lui a valu d'être élu à la tête de la Commission européenne par une majorité assez large, ce mardi 15 juillet à Strasbourg (<a href="http://www.google.be/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=newssearch&cd=1&cad=rja&uact=8&ved=0CB0QqQIoADAA&url=http%3A%2F%2Fwww.lemonde.fr%2Feurope%2Farticle%2F2014%2F07%2F15%2Fjean-claude-juncker-face-au-vote-des-eurodeputes_4457555_3214.html&ei=i6rGU56aJ6aU0QWlq4HgAw&usg=AFQjCNHmDLJNPSZDT2UMBE0O5-smme4QHQ&sig2=-C_yCYDwaTXcE8YVxqpFcA&bvm=bv.71126742,d.d2k" target="_blank">ici</a>). Tous les députés de la gauche belge lui ont apporté leurs voix: Philippe Lamberts, donc (contrairement à la majorité du groupe qu'il préside), ainsi que les trois élus du PS (contrairement à leurs collègues socialistes français se sont abstenus). </span></span><br />
<span class="userContent" data-ft="{"tn":"K"}"><span class="text_exposed_show">Une partie de la presse se montrait elle aussi convaincue par le plaidoyer social de Juncker. </span></span><span class="userContent" data-ft="{"tn":"K"}"><span class="text_exposed_show"><span class="userContent" data-ft="{"tn":"K"}"><span class="text_exposed_show">"Plus social, plus socialiste", titrait mercredi Le Soir.</span></span>"La Commission Juncker défendra une Europe plus sociale", embrayait L'Echo. Euractiv parle d'un "renouveau du modèel social européen" (<a href="http://www.euractiv.com/sections/social-europe-jobs/juncker-and-revival-european-social-model-303525" target="_blank">ici</a>).</span></span><br />
<span class="userContent" data-ft="{"tn":"K"}"><span class="text_exposed_show">L'homme, il est vrai, a donné quelques gages à gauche: il veut soumettre toutes les réformes imposées aux Etats sous programme d'aide à une évaluation d'impact social. Il parle d'un élargissement des fonds pour l'emploi des jeunes et d'un revenu minimum garanti dans toute l'Union. Il évoque aussi un plan d'investissement de 300 milliards d'euros, un montant impressionnant repris à l'unisson par les journaux, qui donne au futur président de la Commission un petit air rooseveltien (très à la mode à l'heure où le New Deal est recyclé à toutes les sauces).</span></span><br />
<span class="userContent" data-ft="{"tn":"K"}"><span class="text_exposed_show">Ce que la presse n'a pas vraiment relevé, c'est que M. Juncker n'a pas donné le début d'un indice sur la manière dont il comptait financer son plan d'investissement. Le budget annuel total de la Commission européenne, il faut le rappeler, est d'environ 140 milliards d'euros. Quant à la Banque européenne d'investissement, on a perdu le compte des fois où on l'a appelée à la rescousse (remember le <a href="http://www.lemonde.fr/idees/article/2012/06/27/la-supercherie-du-pacte-pour-la-croissance_1725420_3232.html" target="_blank">pacte de croissance</a> fumeux vendu par François Hollande ? Gageons aussi que l'<a href="http://www.rtbf.be/info/economie/detail_de-l-eau-dans-le-gaz-pour-le-premier-project-bond-europeen?id=8313045" target="_blank">échec</a> de son premier <i>project bond</i> amènera la BEI à redoubler de prudence dans ses prêts...)</span></span><br />
<span class="userContent" data-ft="{"tn":"K"}"><span class="text_exposed_show">Une poche où M. Juncker ne puisera sans doute pas, c'est </span></span>celle des Européens les plus fortunés et des grandes entreprises. Faut-il rappeler que l'homme a dirigé le Luxembourg pendant près de deux décennies (1995-2013) au cours desquelles le Grand-Duché a développé d'innombrables privilèges fiscaux pour les uns et les autres ?<br />
<span class="userContent" data-ft="{"tn":"K"}"><span class="text_exposed_show">Premier ministre d'un paradis fiscal, ça cadre mal avec l'image sociale polie aux bonnes intentions. Aux journalistes qui osent lui faire remarquer la contradiction, M. Juncker a l'habitude de répondre très sèchement, comme dans cette interview de 2008, où il reproche à France 2 de donner dans le "journalisme primaire" sans toutefois apporter de réponse convaincante (à partir de 7:00). </span></span><br />
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<iframe allowfullscreen="" frameborder="0" height="270" src="//www.dailymotion.com/embed/video/x76lir" width="480"></iframe><br />
<a href="http://www.dailymotion.com/video/x76lir_juncker-a-france-2_news" target="_blank">Juncker a France 2</a> <i>par <a href="http://www.dailymotion.com/smilecollector" target="_blank">smilecollector</a></i>
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<span class="userContent" data-ft="{"tn":"K"}"><span class="text_exposed_show">Lors des ses auditions récentes au Parlement européen, s'efforçant de se rendre sympathique aux députés qui devaient l'élire, il s'est montré plus souriant, mais il n'en a pas moins louvoyé pour éviter de répondre aux questions sur la politique fiscale du Grand-Duché.</span></span>
<span class="userContent" data-ft="{"tn":"K"}"><span class="text_exposed_show">"Je dis oui à la concurrence fiscale, je dis non à la concurrence fiscale déloyale", a-t-il notamment déclaré. Un distinguo qu'on appréciera à la lumière de la résistance farouche opposée par le Luxembourg pendant des années aux progrès vers la transparence fiscale pour les particuliers et les entreprises (voir les <a href="http://ndonne.blogspot.be/search/label/Luxembourg" target="_blank">nombreux articles</a> publiés sur ce blog) </span></span><br />
<span class="userContent" data-ft="{"tn":"K"}"><span class="text_exposed_show">Tout au plus s'est-il engagé à ne pas retirer la proposition de la Commission sur l'assiette commune pour l'impôt des sociétés, le plus important projet d'harmonisation fiscale actuellement en Europe </span></span><span class="userContent" data-ft="{"tn":"K"}"><span class="text_exposed_show"><span class="userContent" data-ft="{"tn":"K"}"><span class="text_exposed_show"> (voir notamment <a href="http://ndonne.blogspot.be/search/label/CCCTB" target="_blank">ces articles</a>)</span></span>.</span></span><br />
<span class="userContent" data-ft="{"tn":"K"}"><span class="text_exposed_show">Ne pas effacer le peu qui a déjà été fait, c'est bien le moins qu'on puisse attendre du président de la prochaine Commission.</span></span> Celle-ci aura à poursuivre les efforts de lutte contre l'optimisation fiscale agressive initiés ces dernières années, et qui commencent à peine à donner des résultats concrets. Elle devra notamment mener à terme les enquêtes lancées contre les rulings et les privilèges fiscaux octroyés par le Luxembourg (<a href="http://www.paperjam.lu/article/fr/le-luxembourg-vise-pour-fiat-et-d-autres-rulings" target="_blank">ici</a>) et par d'autres pays.<br />
On peut douter que Jean-Claude Juncker mettra beaucoup de zèle à cette tâche. Tout dépendra, en première instance, de la personnalité qu'il choisira pour le portefeuille de la fiscalité. Optera-t-il pour un poids lourd politique, qui pourra faire avancer la transparence et l'équité ? Ou confiera-t-il le poste à un commissaire de seconde zone ? Tout laisse à penser que que le second scénario sera le bon. Mais on ne demande qu'à se tromper.Unknownnoreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3619764298792448838.post-8352383278701055162014-07-08T12:52:00.004+02:002014-07-08T12:52:54.713+02:00Transparence fiscale des entreprises: quand PwC mange à tous les râteliersConnaissez-vous le CBCR ? Derrière cet acronyme se cache un nouvel outil public qui doit assurer la transparence fiscale des multinationales. La chose n'est pas anodine: si aujourd'hui on sait que beaucoup de grandes entreprises parviennent à réduire leur impôt sur le bénéfice globalement sous les 10%, on ne dispose que d'informations très incomplètes sur les montants versés à chaque pays. On peut comprendre le souhait de confidentialité pour les contribuables particuliers, mais dans le cas d'entreprises qui jouent un rôle considérable dans nos vies de travailleurs/consommateurs mondialisés, ce secret n'est franchement plus justifiable.<br />
C'est tout l'intérêt du CBCR, le <i>country-by-country reporting. </i>Cette nouvelle norme obligera bientôt les entreprises à dévoiler, dans chaque pays d'activité, les impôts payés et les subventions reçues. Proposé en 2003 par le comptable britannique Richard Murphy, proche du mouvement de justice fiscale, le CBCR a parcouru depuis une longue route semée d'embûches. Aujourd'hui, il est en passe de devenir un standard reconnu internationalement. Pour le plus grand plaisir de son instigateur (<a href="http://www.taxresearch.org.uk/Blog/2013/02/28/we-got-it-country-by-country-reporting-is-on-its-way-for-banks/" target="_blank">ici</a>).<br />
L'Europe et les Etats-Unis l'ont déjà imposé <b>dans le secteur des industries extractives</b>. Puisque celles-ci puisent dans les ressources naturelles des pays, notamment dans les pays du sud, il a été jugé opportun que soit connu le juste prix payé en retour sous forme d'impôt. A partir de 2016 ou 2017, les entreprises minières et forestières commenceront donc à publier des rapports CBC.<br />
Mais pourquoi s'arrêter en si bon chemin ? La transparence pourrait aussi être imposée <b>à toutes les entreprises</b> multinationales. Les chefs d'Etat et de gouvernement européens l'ont d'ailleurs proclamé en mai 2013, après un sommet consacré à l'évasion et l'optimisation fiscale. Malheureusement, comme je l'ai rapporté sur ce <a href="http://ndonne.blogspot.be/2014/03/quand-berlin-et-londres-sallient-pour.html" target="_blank">blog</a>, cet objectif a été renvoyé aux calendes grecques.<br />
Un autre secteur, toutefois, a été jugé propice à l'application du CBCR: <b>le secteur bancaire</b>. Une directive européenne récente sur les fonds propres des banques impose à celles-ci de dévoiler un certain nombres d'informations pays par pays (impôts, mais aussi chiffre d'afaire, nombre de salariés, etc.). Dans un climat public très hostile à la finance, les opposants à cette transparence ont à peine réussi à obtenir que cette nouvelle obligation fasse l'objet d'une évaluation (et d'une possible révision) par la Commission européenne.<br />
Or, voilà que cette dernière vient de passer la patate chaude au cabinet d'audit PwC. Après un appel d'offre, le cabinet a été chargé de réaliser l'étude. Motif ? Le manque de ressources en interne pour procéder à une telle analyse. Le problème, c'est que PwC ne présente aucun - mais vraiment aucun - gage d'expertise indépendante. Le cabinet est très actif dans l'optimisation fiscale des entreprises (comme je le documente au chapitre 7 de mon <a href="http://ndonne.blogspot.be/2014/04/dumping-fiscal-enquete-sur-un-chantage.html" target="_blank">livre</a>). Sa branche belge donne dans le lobbying antifiscal en soutenant le "tax freedom day". Plus piquant: <b>le cabinet a milité contre le CBCR</b> dans le cadre d'une consultation de l'OCDE sur le sujet. Mandaté par 14 entreprises multinationales, PwC a plaidé pour que les informations pays par pays soient réservées aux administrations et ne fassent l'objet d'aucune communication au public (voir <a href="http://www.oecd.org/ctp/transfer-pricing/volume3.pdf" target="_blank">ici</a>, à partir de la page 147). <br />
Autrement dit: on demande à PwC de donner un avis indépendant sur une transparence fiscale, alors que ce même cabinet l'a déjà dénoncée au nom de ses clients. Le conflit d'intérêt ne saurait être plus évident.<br />
Comment s'en étonner ? Depuis des années, les grands cabinets d'audit ont réussi à se placer au centre du jeu, conseillant d'un coté les gouvernements sur les mesures fiscales, de l'autre les multinationales sur les façons de les contourner.<br />
Récemment encore, dans le cadre de sa présidence du G20, le gouvernement australien a accepté que Deloitte, KPMG et ce même PwC sponsorisent une grande conférence sur l'avenir de la fiscalité internationale, en échange de places enregistrées et de tribunes (<a href="http://www.smh.com.au/business/g20-tax-confab-was-a-pay-per-view-event-20140525-38wq7.html#ixzz32p8RzGAh" target="_blank">ici</a>). Un rôle de choix, quand on sait à quel point les multinationales que ces cabinets représentent craignent le tour de vis opéré par le G20 et l'OCDE (<a href="http://www.lefigaro.fr/impots/2014/06/04/05003-20140604ARTFIG00312-les-multinationales-redoutent-la-fin-de-l-optimisation-fiscale.php" target="_blank">ici</a>). <br />
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